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Paul Daniel et l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine - Wagner comme on l’aime - Compte-rendu
Il s’en passe des choses du côté de nos orchestres régionaux parmi lesquels de belles dynamiques s’affirment grâce à l’arrivée de nouveaux directeurs musicaux. On ne reviendra pas sur Toulouse où Tugan Sokhiev, aux commandes depuis 2005, accomplit les miracles que l’on sait. Bien plus récemment Leonard Slatkin à Lyon et Marko Letonja à Strasbourg sont venus apporter tonus et optimisme à leurs formations respectives. Et n’oublions pas les cas, plus discrets mais significatifs, de l’Orchestre d’Auvergne avec Roberto Forés Veses, de Nicolas Chalvin à l’Orchestre des Pays de Savoie ou de Samuel Jean avec l’Orchestre Régional Avignon Provence. Par ailleurs, on est impatient de goûter aux premiers fruits de l’entrée en fonction de Wolfgang Dörner à Cannes…
Avec l’arrivée de Paul Daniel, il convient d’ajouter l’Orchestre National Bordeaux Aquitaine à la liste des phalanges qui entrent dans une ère nouvelle et dont on a envie de suivre de près l’évolution.
Après une rentrée mahlérienne avec, choix « culotté », rien moins que la Symphonie « Résurrection », le second programme du chef britannique à la tête de ses troupes bordelaises était entièrement consacré à Richard Wagner : des pages symphoniques célèbres et trois airs confiés à la soprano américaine Heidi Melton. Autant dire un programme extrêmement révélateur de la forme et de l’implication d’une phalange.
Dès les premières notes de l’Ouverture de Tannhäuser on sent que le courant passe entre le chef et ses musiciens et, bientôt, dans l’acoustique remarquablement spatialisée du nouvel Auditorium de Bordeaux, s’affirme une conception exemplaire de clarté et de lyrisme. C’est du côté du Wagner d’un Boulez – dont Daniel fut l’assistant sur d’autres répertoires jadis –, d’un Karajan ou d’un Philippe Jordan que cette conception regarde. Exit l’opacité d’une certaine tradition, le pathos inutile ; la musique se déploie portée par des cordes remarquables de plénitude et des vents qui démontrent que l’acoustique de la nouvelle salle permet des équilibres subtils. On n’est pas moins séduit par un Prélude de Tristan que le chef fait chanter avec un mélange de simplicité et de fièvre, sans jamais le surcharger d’intentions. Dans Aube et voyage de Siegfried sur le Rhin Paul Daniel distille les couleurs avec beau sens poétique et narratif. Ce Wagner plein de feu et d’images s’illustre aussi dans la Marche funèbre de Siegfried qui fuit l’emphase pour mieux viser sa cible et l’atteindre – dans le mille !
La partie vocale de la soirée n’est pas en reste. Heidi Melton et Paul Daniel se connaissent déjà et on eu l’occasion de collaborer à la fin de l’été passé. Voix généreuse, homogène, d’une grande justesse d’intonation, la jeune cantatrice s’empare du « Dich, teure Halle » d’Elisabeth avec un bonheur rayonnant. On n’est pas moins convaincu par sa Mort d’Isolde, vécue avec la longueur de souffle et l’émotion qui conviennent. L’intelligence de l’accompagnement de Paul Daniel aide fort il est vrai, tout comme dans l’Immolation de Brünnhilde où il est précieux d’avoir affaire à une baguette qui fait la distinction entre intensité expressive et débauche de décibels.
En avril prochain Heidi Melton sera à nouveau Brünnhilde à Bordeaux, cette fois dans un 3ème Acte de Siegfried que l’on s’impatiente d’entendre vibrer sous la poétique baguette de Paul Daniel. Quant à un ouvrage intégral de Wagner, on ne connaît pas encore son titre mais il est prévu pour la saison 2014-2015 à l’Opéra de Bordeaux. Patience.
Alain Cochard
Bordeaux, Auditorium, 9 octobre 2013
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Photo : FDemesure
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