Quel chemin parcouru depuis 1984, lorsque Kaija Saariaho déclarait qu’elle ne composerait jamais d’opéras. Gérard Mortier a su la tenter en lui commandant L’Amour de loin qui fut créé à Salzbourg en 2000, et cette saison, l’Opéra de Paris dévoilera son second ouvrage lyrique, également sur un livret d’Amin Maalouf, Adriana Mater.

Le spectacle épuré de Peter Sellars est parvenu à une perfection indépassable, comme si il avait atteint une sorte de point de non retour à l’occasion de cette reprise à l’Opéra National de Finlande en 2004. Cette perfection doit beaucoup à la direction minérale, d’une tension inextinguible, voulue par Esa-Pekka Salonen, qui magnifie l’orchestration torpide, d’une sensualité extatique qui doit beaucoup à l’école française (Messiaen oui, mais comment ne pas penser également à Jolivet ?).

Cette histoire d’amour à distance qui ne trouve sa résolution que dans la mort de Jaufré enfin parvenu dans les bras de Clémence est bouleversante comme seul l’a été avant elle celle de Pelleas et Mélisande, et les trois protagonistes sont simplement idéaux, avec une mention toute spéciale pour le Jaufré de Gerald Finley.

Jean-Charles Hoffelé

DVD l’Amour de loin de Kaija Saariaho. Deutsche Grammophon 00440 073 4026.