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Paris - Compte-rendu d'opéra : Armoire escamoteuse (Gérard Majax)
Une nouvelle déception pour l’année Mozart.
Vous qui doutiez que le Burlador ait pu si facilement se consumer dans les flammes de l’enfer, André Engel ne vous décevra pas. Le blazer à peine escarbillé, il resurgit de l’Hadès à l’étonnement amusé de la joyeuse compagnie qui lui a fait cortège durant deux heures et demie. On ne brûle pas le diable. Et quelle autre fin que cette pirouette Engel aurait il pu trouver pour sa médiocrissime adaptation ? Voici Don Giovanni chez les Vitelloni, une Italie des années cinquante, stigmatisée par le vison de Donna Elvira, en mal d’aventure et de villégiature, y promène son ennui, accumulant les situations burlesques, faisant du Drama giocoso une comédie à la Dino Rosi.
Cette réduction brille par une direction d’acteur exsangue, qui consterne venant d’un metteur en scène aussi chevronné. Et lorsque l’on songe aux inventions et à la force d’un spectacle comme Cardillac vu cette saison à Bastille, on ne s’explique pas un échec aussi cuisant. Même le décor pêche, avec ce sous sol pour le cimetière ou cette sempiternelle jetée de béton inachevée, cet intérieur de maison de maître défraîchi où campent Don Giovanni et Leporello. L’armoire escamoteuse qui provoque l’hilarité de la salle durant la scène finale est emblématique d’une production au fond assez sinistre. L’élément du spectacle que l’on préfère, le rideau de scène façon catafalque imité de Cassandre, fait hiatus avec tout le spectacle. Il voudrait nous faire croire que les glorieuses années aixoises d’une production mythique se sont invitées au TCE, ce que le plateau infirme en grande part : depuis sa Sémiramide de poche, on craignait pour le soprano jadis splendide d’Alexandrina Pendatchanska. Alors que la saison dernière elle triomphait à Toulouse de tous les pièges de Donna Anna avec une technique trempée et une voix encore à son zénith, son Elvira parisienne ne fait qu’exposer ses passages improbables, son émission en force, tubée, sa vocalise pénible à force de n’être plus qu’athlétique.
Avec un instrument bien moindre, Ciofi laissait par contraste une Donna Anna touchante à force de tendresse, et remportait les suffrages du public à égalité avec la Zerlina frémissante d’Anna Bonitatibus, seule véritable voix mozartienne de la soirée déjà remarquée in loco pour son Cherubino d’anthologie, littéralement copié sur celui de Von Stade. Plateau gris trottoir du coté des hommes : avec son baryton au demi ton prés, Gallo campe de son canto brutto un Don Giovanni aux petits pieds, d’une routine facile qu’il partage d’ailleurs avec le Leporello « alla Corena » de Lorenzo Regazzo. Un masetto en voix minuscule et fermée (Alessandro Longo) contrastait pour son malheur avec la splendeur du ténor de Franceso Meli : oui, un Radamés qui chante Don Ottavio, c’est vrai, mais qui applique son style, ose des messa di voce capiteuses, et chante mâle comme devrait faire tout Ottavio qui se respecte. C’était avec le Commandeur encore trop jeune mais prometteur de Giovanni Battista Parodi l’un des trois bonnes surprises de cette distribution italianophone.
Le pire restait pourtant la fosse : Pido, métronomique et sec trouvait à qui parler : un Concerto Köln sans une couleur, paradoxe incompréhensible, jouant carré, étriqué, et qui massacrait le génie brillant dont Mozart a habillé son chef d’œuvre.
Jean-Charles Hoffelé
Wolfganf Amadeus Mozart : Don Giovanni, Théâtre des Champs-Elysées le 19 juin, puis les 21 et 23 juin.
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Photo :DR
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