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La Chronique de Jacques Doucelin - Concerts : trop de salles à Paris ?
Un communiqué du Ministre de la Culture et de la Communication vient de confirmer Laurent Bayle, actuel responsable artistique de la Cité de la Musique et de la salle Pleyel, dans ses fonctions de maître d’ouvrage pour la construction d’un nouvel auditorium symphonique de 2.200 places dans le Parc de La Villette. Dix mois se sont donc écoulés (voir notre chronique du 12 mars 2006) depuis l’annonce surprise et conjointe de ce projet par l’Etat et le maire de Paris qui accepte de financer 50% du coût de construction. Il s’agit sans doute de verrouiller la chose à la veille des prochaines échéances électorales.
Certes, mais on ne peut s’empêcher d’y voir deux autres mobiles : d’une part, conforter Laurent Bayle dans sa vaste mission symphonique parisienne au moment où il a été écarté de la direction de l’Opéra de Paris au profit d’un homme de métier, Nicolas Joël, et prendre de vitesse Radio France qui a annoncé son intention de construire une nouvelle salle de concerts de 1.500 places dans ses murs à l’horizon 2012 elle aussi.
Car si Paris a fait longtemps figure d’homme symphonique malade de l’Europe, depuis le remodelage réussi de Pleyel, la capitale française est en passe de connaître un excès en sens inverse ! Calculez, en effet. 1.800 fauteuils à Pleyel, 1.000 à la petite salle de la Cité de la Musique, 1.000 à Gaveau, plus 2.200 pour la grande salle de La Villette et 1.500 à Radio France : c’est le trop plein assuré à l’horizon 2012 ! D’autant qu’il ne faut pas oublier le Théâtre des Champs-Elysées (1.800 places) et le Châtelet (2.300 places). Le poids de l’Etat auquel s’ajoute désormais celui de la Ville de Paris étant ce qu’il est… Radio France ne paraît guère peser bien lourd…
Verrouillée ou pas, la question de la répartition de l’activité symphonique parisienne dans les différents sites existants ne manquera pas de se poser aussitôt après les prochaines élections, soit dès la rentrée 2007. Comme il y a peu de chance que la dette extérieure du pays ait diminué et que l’argent public puisse couler à flot, il est certain qu’une des deux nouvelles salles boira le bouillon : devinez laquelle… C’est qu’il faut tout de même réfléchir un tant soit peu avant de décider la construction de pareils équipements dont le coût de fonctionnement n’est pas négligeable ! Et surtout méditer sur la situation créée par la simple réouverture de Pleyel qui a littéralement vidé comme un siphon les autres salles : Opéra de Paris, Châtelet, Théâtre des Champs-Elysées.
Or, savez-vous que Pleyel ne fait déjà pas le plein pour autant ? Les classes moyennes s’appauvrissant, semble-t-il, et les prix des places de concert étant de plus en plus élevés, on a de quoi s’inquiéter sur le taux de remplissage de toutes ces salles à l’horizon 2012. Même si l’on renonce à celle de la Radio pour que ses deux orchestres continuent d’alimenter les saisons des lieux existants, l’Orchestre National au Théâtre des Champs-Elysées, le Philharmonique à Pleyel, on est inquiet devant cette pléthore. Et l’on se demande bien sincèrement où l’on va trouver à la fois le public et les formations musicales pour animer l’ensemble de cette future usine à gaz symphonique, comme seule l’Administration française en a le secret.
En tout cas, les candidats à la présidence de la République ont tout intérêt à se préparer à trancher dans le vif tant qu’il en est encore temps.
Jacques Doucelin
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Photo : DR
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