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La Chronique de Jacques Doucelin - Chaises musicales
Jean de Saint Guilhem n'aura fait qu'un bien bref séjour à la tête du spectacle vivant au ministère de la Culture. Cet énarque discret, ancien intendant de la Chapelle Royale de Philippe Herreweghe, vient, en effet, de laisser son bureau de Directeur du Théâtre, de la Musique, de la Danse et des Spectacles à un enfant de la balle, Georges-François Hirsch, qui occupait auparavant les fonctions de Directeur général de l'Orchestre de Paris. Résumer l'ensemble de la carrière de cet homme élégant à la silhouette juvénile ressemblerait à un immense kaléidoscope des métiers du spectacle, dont il a gravi les échelons à la force du poignet. Car il représente une espèce de gestionnaire culturel en voie de disparition. En dépit des apparences, il y a chez Georges-François Hirsch du dinosaure de la IVe République. Car il a tout fait dans le monde du théâtre, des tournées chorégraphiques, de l'opéra et pour finir du symphonique. Mais à l'inverse des produits standardisés de l'ENA, qui nivelle les institutions et les hommes depuis plus de trois décennies, lui, a appris sur le tas et s'est formé les mains dans la pâte et non par ouï-dire. Sa vie professionnelle tient de la légende avec des débuts de technicien à l'Opéra de Limoges, dont le circuit électrique n'était alors même pas aux normes!
Certes, son père, ami de François Mitterrand au lendemain de la seconde guerre mondiale, avait été nommé par ce dernier administrateur de l'Opéra de Paris. C'est dire que lorsque le même Mitterrand, devenu socialiste dans l'intervalle, nomma le fils au fauteuil du père au Palais Garnier, à la place de Jean-Albert Cartier, dans les années 90, au delà de la péripétie lyrique, c'est la fidélité en amitié qui s'imposait aux observateurs. Georges François Hirsch appartenait du reste au cercle des intimes du président Mitterrand. Comme son modèle et bienfaiteur, c'est un homme de réseaux pour qui les clivages politiques ordinaires n'ont guère de signification.
D'aucuns se sont dit surpris, faute de pouvoir regretter ouvertement sa nomination. Mais c'est oublier que l'ancien Directeur général de l'Orchestre de Paris avait été plusieurs saisons conseiller musical de Christine Albanel du temps que celle qui avait naguère écrit les discours de Jacques Chirac, présidait aux destinées de l'établissement public du domaine de Versailles. C'est donc tout naturellement qu'elle s'est tournée vers Georges-François Hirsch lorsqu'il s'est agi de mettre en oeuvre la réforme des différentes directions dépendant du ministère de la Culture. Car celles-ci passent d'une demi-douzaine à trois seulement: politique d'économie et de réduction de personnel oblige ! L'hôtel particulier de la rue Saint Dominique sera, en outre, abandonné au profit d'un rapprochement de la rue de Valois, siège du Ministère de la Culture. C'est pourquoi la mission du nouveau directeur trouve sa cohérence dans le soutien à la création. Car son domaine ne s'étend plus seulement à la musique, au théâtre ou à la danse comme c'était le cas de ses prédécesseurs, mais aussi aux arts plastiques. Vieux briscard, Georges-François Hirsch a été chargé de plus d'une mission délicate, siégé dans des commissions d'experts et rédigé plusieurs rapports destinés à réformer ou à améliorer la gestion d'institutions lyriques notamment dans le Midi. Avec des succès mitigés au demeurant. Mais il connaît bien les acteurs et il y a fort à parier que les « intermittents » du spectacle ne devraient pas trop bouger sous son règne qui n'excédera d'ailleurs pas les deux ans puisqu'il est aujourd'hui âgé de 63 ans.
C'est au cours d'un conseil d'administration de l'Orchestre de Paris que préside l'ancien ministre socialiste Pierre Joxe, grand ami de Georges-François Hirsch, que son successeur sera nommé. Mais il semble qu'on doive attendre encore, tant sa nomination a été pour beaucoup une surprise. D'autant qu'un autre poste d'importance est vacant dans le monde musical parisien: la direction du Théâtre des Champs-Elysées, qui fut du reste une étape dans la carrière de Georges-François Hirsch. Plus de vingt dossiers ont été déposés. Nous en sommes à l'ultime sélection qui sera arbitrée au « château », car le président du Théâtre des Champs-Elysées n'est autre que le conseiller pour les affaires sociales de Nicolas Sarkozy Raymond Soubie, éminence grise de nombreux gouvernements depuis Raymond Barre.
Jacques Doucelin
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Photo : DR
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