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Paris - Compte-rendu : Brillantissime fin de saison
Coup sur coup à 24 heures d'intervalle, ont eu lieu dans les deux grandes salles de concerts parisiennes, le Théâtre des Champs-Elysées et Pleyel, deux événements musicaux majeurs: dans la première, l'Allemand Christian Thielemann (photo) et le Philharmonique de Munich proposaient une soirée Brahms-Schumann, dans la seconde, le lendemain, l'Estonien Mariss Jansons et le Concertgebouw d'Amsterdam sacrifiaient à Weber, Schumann et Moussorgsky. Thielemann est dans la plus pure tradition de ces paysans poètes que sont les kapellmeister germaniques.
Il en a le sérieux, le savoir, la technique et la vis musica chevillée à son grand corps dont la masse rassure ses musiciens. Avant de diriger le Ring à Bayreuth cet été, il plonge à Paris dans le premier romantisme avec l'ouverture de Manfred et la 4e Symphonie de Schumann qui a tant influencé Wagner. Il n'est pas du genre à rester à la lisière de la forêt germanique: il en explore tous les taillis et en éclaire les recoins les plus sombres sans se repérer sur ces cartes que sont les partitions. Par sécurité, il prend celle du Concerto de Brahms qu'il dirige avec en soliste le violoniste américain Gil Shaham: l'entente est parfaite pour une séance de musique de chambre à cent. Ce concert sera retransmis par France Musique le 3 juin à 16 heures.
On reste dans le romantisme allemand avec les musiciens néerlandais et leur patron, mais en franchissant un cap : nous sommes en présence de l'orchestre le plus équilibré qui se puisse imaginer et ce, à tous les niveaux. Ainsi de ces jeunes instrumentistes disciples des professeurs chenus assis à leur côté. Chacun est un prodigieux soliste au service du groupe. Le résultat, c'est d'abord une clarté, une transparence inouïe des timbres, qui confère à leur interprétation une légèreté diaphane quand il le faut. Mais l'absence d'épaisseur ne signifie pas manque de profondeur ! Cette fraîcheur de couleur sied particulièrement à la printanière 1ère Symphonie de Schumann comme à l'ouverture d'Euryanthe de Weber. Après l'entracte, vient le choc avec les célèbres Tableaux d'une exposition de Moussorgsky dans l'orchestration de Ravel. Jamais, on ne les a entendus de la sorte ! Ce diable de Mariss Jansons réussit à faire entendre à la fois les couleurs ravéliennes de L'Enfant et les sortilèges et celles de la grande Russie. Sa palette de nuances est stupéfiante: nous sommes à des années-lumières de ces grosses machines tonitruantes dont se contentent trop de chefs dans cette oeuvre autrement plus riche. Rien n'est appuyé, mais tout est dit. Ils ont droit à une ovation debout amplement méritée.
Jacques Doucelin
Théâtre des Champs Elysées, le 23 mai 2008 / Salle Pleyel, 24 mai 2008.
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Photo : DR
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