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Paris - Compte-rendu : Arcadi Volodos - La métamorphose d’un virtuose
« Le moment est venu pour moi de briser ma chrysalide de virtuose et de laisser plein vol à ma pensée » : Arcadi Volodos pourrait reprendre à son compte le mot de Liszt du grand-duc Charles-Alexandre de Saxe en 1847. Phénoménal moment de piano bien sûr, mais aussi et surtout de musique que celui offert par cet interprète de trente-six ans dans le cadre de la saison de Jeanine Roze. La chrysalide du jeune virtuose qui signait à ses débuts un coruscant programme de transcriptions virtuoses (1 CD Sony) s’est bel et bien brisée. Volodos demeure certes un technicien foudroyant animé d’une connaissance sidérante de l’instrument, mais c’est désormais un musicien de premier ordre qui se révèle à nous - infiniment plus communicatif, plus rayonnant qu’on l’a connu il y a quelques années.
Schubert ? Avouons que les précédentes incursions du pianiste chez cet auteur nous avaient plus que laissé sur notre faim. Le moment n’était pas encore venu. Sa métamorphose opérée, Volodos peut désormais s’autoriser une Sonate « Fantaisie » D. 894 d’anthologie. Au moment même où Brendel donnait son dernier récital parisien au Châtelet, se révélait un schubertien de premier ordre, capable de saisir toute la singularité du musicien avec une intensité poétique qui ne consiste jamais à « beethovéniser » le discours. Sonate « Fantaisie » : Volodos nous entraîne dans cet ouvrage fleuve avec un mélange de gravité et de tendresse et une incroyable richesse de la palette sonore. Il semble musarder ; il ne perd pas une seule seconde le fil du propos. Le mélomane exulte in petto. Toujours prêts à passer à l’attaque, les tousseurs se tiennent coi – pas une mince performance à Paris Monsieur Volodos !
Le miracle se renouvelle en seconde partie avec une série de Liszt magnifiés par une science des timbres et une musicalité irréprochable. Les moments les plus orageux de La Vallée d’Obermann ne cèdent jamais à une virtuosité creuse tant l’interprète comprend le dessein orchestral du compositeur. Il Penseroso et La Prédication aux oiseaux offrent deux leçons d’intelligence poétique et d’émotion sincère, avant que la Rhapsodie n°13 - revue par Volodos – ne referme le programme.
Je ne voudrais pas avoir l’air de faire la fine bouche mais, après les sommets sur lesquels nous nous trouvions depuis le début de la soirée, la présence de cette pièce, au répertoire de l’artiste depuis bien longtemps, semble superfétatoire. Souvenir d’une époque révolue qui, par contraste, ne souligne que mieux la métamorphose du virtuose. Quatre bis (Mompou, Moszkowski/Volodos, Rachmaninov/Volodos, Scriabine) et un triomphe.
Alain Cochard
Théâtre des Champs-Elysées, 2 juin 2008
Programme détaillé du Théâtre des Champs-Elysées
Photo : DR
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