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Paris - Compte-rendu - Zoroastre de Rameau, à l’Opéra Comique - Saignée
Le DVD est-il menteur ? Habilement capté dans ses premiers pas sur la scène idéale du Théâtre de Drottningholm, ce Zoroastre avait pu faire illusion. Nous l’avions même aimé.
Confronté frontalement au spectacle celui ci s’effondre d’autant qu’on sort tout juste d’un Hippolyte et Aricie toulousain restitué avec exactitude et poésie où tout l’univers de Rameau refleurissait.
Ici on le violente, et pas seulement dans la Messe noire et la saignée du IV. Exemple entre cent : comment croire un instant à cette Erinice pintée au III ? Ce que tente Pierre Audi n’est pas une restitution, son V dans la cage nue du théâtre en est autant l’aveu qu’un effet mort né, mais un travail d’accompagnement assez pénible, souvent un simple surlignage, ou un déboutonnage comme dans le IV au point de pouvoir prétendre au grand guignol. Inutile de s’attarder, rien ici ne tient les promesses qui s’énoncent ça et là, tout abandonne en cours de route le public mais aussi la scène.
Cast incertain – Anders J. Dahlin souffre, les harmoniques de la voix à la trame, les aigus pincés : Zoroastre est écrit en tessiture centrale, un instrument aussi éclatant ne peut que s’y user, il suffit de voir qui durant les reprises s’y mesura (Poirier, plus après la mort de Rameau, Legros), le modèle restant la vocalité du créateur, Pierre Jelyotte, médium nourri et intense couronné par des aigus de clairon. Qu’est-il arrivé à Anna-Maria Panzarella, en voix pincée, usant d’un arsenal vériste, tirant le vrai personnage qu’elle avait créé vers sa caricature ?
Les clefs de fa sont lancées dans un concours de faussetés, le français reste délicat à plus d’un, seule émerge de cette petite débâcle l’Amélite sensible de Sine Bundgaard. Christophe Rousset ne tient pas ce Zoroastre qui veut une toute autre ampleur, et son orchestre n’est chez lui que dans les danses, mais trahi alors par les pantomimes de clubeur-karatéka d’Amir Hosseinpour. Et les chœurs imprécis ruinent les trésors d’invention et d’expression que Rameau leur à offert ici plus qu’en aucune autre de ses Tragédies Lyriques.
On comprend mieux l’attachement de Christophe Rousset à la version de 1756. C’est que Pierre Audi y défend la mort des idéaux que Cahuzac produisit, réduisant les luttes philosophiques de son livret original à une méchante rivalité : un couple maudit veut la destruction d’un couple béni. Tout le spectacle est lu à cette aune, et ne ment donc pas. Mais plus d’arrières plans, plus de subtilités auraient permis de voir à travers cette seconde version la force de la première.
D’ailleurs, rien n’empêche Zoroastre de retrouver son premier (et vrai) visage : le version de 1749 est reconstituée, accessible, cohérente et rend compte d’un projet unique qui mériterait enfin d’être révélé. Qui l’osera ?
Jean-Charles Hoffelé
Jean-Philippe Rameau, Zoroastre, version 1756, Opéra Comique, le 25 mars, puis les 27 et 29 mars.
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Photo : DR
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