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Compte-rendu : Festival d’Eisenstadt - Haydn tout feu tout flamme
Depuis 1989, les Journées Internationales Haydn célèbrent, dans la ville autrichienne d’Eisenstadt à la frontière hongroise, un compositeur qui travailla trois décennies durant au service du prince Nicolas « Le Magnifique ». La programmation s’articule systématiquement autour d’un thème et l’édition 2010 a choisi de célébrer, en plus des bicentenaires Chopin et Schumann, de musiciens tels Cherubini, Pergolèse, Mahler ou Albéniz.
Ouverture en grande pompe dans la superbe Haydnsaal du château baroque d’Eisenstadt avec l’oratorio Les Saisons dirigées par Adam Fischer (photo) à la tête de l’Orchestre autro-hongrois. Familier des Journées et fervent haydnien devant l’Eternel, ce chef a enregistré entre 1987 et 2001 une intégrale discographique remarquée des Symphonies avec la même phalange (originellement publiée chez Nimbus, elle a été rééditée par Brilliant Classics).
Vigueur du trait, clarté de l’expression, simplicité de ton caractérisent des Saisons pleine de vie et de couleurs (les bois et les cuivres sont à cet égard d’une qualité d’intonation que l’on aimerait retrouver dans nombre d’exécutions baroques). Le ténor Daniel Behle (Lukas) est un véritable chanteur de lied, avec une retenue dans l’expression mais d’une ligne de chant subtile et sans apprêt, le baryton Mathias Hausmann (Simon) possède une profondeur dans l’intonation et un sens théâtral très affirmé, tandis que la soprano Anna-Maria Labin (Hanne) magnifie la grâce juvénile d’un personnage à la tendresse toute virginale. Préparé par Michel Grohotolsky et d’une tenue irréprochable, le Wiener Kammerchor contribue à un profond sentiment d’authenticité.
Dans le cadre de l’Empiresaal, plus adapté à la musique de chambre, le Quatuor Casal (un ensemble suisse qui remplace au pied levé le Quatuor Meta4) manifeste une alacrité gorgée d’énergie dans le Quatuor op 20 n°2 de Haydn, mais semble refuser au Quatuor op 41 n°3 de Schumann sa dimension romantique tout en montrant une grande homogénéité : la lumière franche et crue l’emporte cependant sur la rêverie et la mélancolie. En revanche, dans le Quatuor op 76 n°1 de Haydn, on retrouve un enthousiasme, un jaillissement, un cantabile sûr, un aspect rythmique affirmé. Cette impression est confirmée par la densité expressive du bis (Poco adagio cantabile du Quatuor « l’Empereur » op 76 n°3), clin d’œil à une pièce qui fut créée au château d’Eisenstadt en 1797. Jeune formation à suivre, le Quatuor Casal vient d’enregistrer son premier CD (chez Solo Musica) avec des pages de Boccherini, Haydn …
Enthousiasment concert que celui donné dans la Haydnsaal par la Capella Augustina sous la direction d’Andreas Spering ! Cherubini avec sa Symphonie en ré majeur et l’Ouverture de Démophon paraît plus formel que Haydn dans la Symphonie n°103 « Roulement de timbales », mais l’interprétation enlevée et la ferveur des interprètes ménagent dans tous les cas de beaux effets de surprise. Le sentiment dramatique, l’art des contrastes prévalent dans des lectures d’une grande lisibilité et d’un engagement contagieux.
Le concert du dimanche avec l’Orchestre de chambre de Prague dirigé par Milan Turkovic fait voisiner des transcriptions d’œuvres de Haydn avec sa Symphonie n°90. Dans l’arrangement pour harpe du Concerto pour clavier en sol majeur Hob. XVIII/4, le harpiste français Xavier de Maistre (soliste de la Philharmonie de Vienne), d’habitude excellent, ne paraît pas être dans son meilleur jour (traits savonnés, sonorité étique). En comparaison, le trompettiste russe Sergei Nakariakov brille de tous les feux de sa virtuosité dans l’arrangement du Concerto pour violoncelle n°1 en ut majeur. Par la fluidité et la souplesse du cantabile, sa maîtrise technique, il réussit le miracle de faire oublier que cette partition appartient à un autre instrument. Enfin, la Symphonie en ut majeur est servie avec beaucoup de tact et de charme par les instrumentistes praguois. La direction de Turkovic, qui prend le temps de savourer la musique, sait aussi se montrer précise dans une composition plus difficile d’exécution qu’il n’y paraît. Un grand moment parmi ceux que réserve ce festival attachant.
Michel Le Naour
Journées Internationales Haydn, Autriche, Eisenstadt, Haydnsaal et Empiresaal, du 9 au 12 septembre 2010
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Photo : DR
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