Pour le troisième concert de l’intégrale des Symphonies de Beethoven avec l’Orchestre Philharmonique de Vienne, Christian Thielemann reste droit dans ses bottes. Sa conception dans les 1ère, 2ème et 3ème Symphonies ne déroge pas de celle précédemment chroniquée par Jean-Charles Hoffelé (*).

Toujours aussi sérieux, prenant les symphonies « haydniennes » à bras-le-corps, privilégiant les coups de boutoir et les accents, il répond certes à ce Beethoven offensif et décidé, mais laisse de côté l’humour et la tendresse qui appartiennent aussi au Titan de Bonn. La pâte sonore de la Philharmonie de Vienne s’en trouve même modifiée au point que la souplesse et la volupté bien connues des musiciens sont contrariées par un traitement si tudesque.
Dans l’« Eroica », le complexe de grandeur qui prévaut tout au long de ce cycle est plus approprié. Malgré une mise en place parfois approximative (Allegro con brio), la lecture du chef s’inscrit davantage dans l’esprit conquérant de cette œuvre. La Marche funèbre avance non sans lenteur et manque de ce lyrisme cher aux défenseurs de la tradition allemande (Furtwängler, Karajan, Böhm…). En revanche, les bois font honneur à leur réputation dans un Scherzo enlevé. Le final s’appesantit parfois dans l’accumulation des variations et Thielemann se permet même un arrêt-image avant la coda pour mieux impressionner lors de la péroraison conclusive. Le temps ne semble pas compter pour lui (55 minutes pour l’« Eroica » !) et son interprétation demeure plus brucknérienne que beethovénienne. C’est dire que, malgré la qualité de la Philharmonie de Vienne et l’originalité de la vision, cette Troisième Symphonie ne réussit pas à convaincre.

Michel Le Naour

Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 24 novembre 2010

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