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Suisse / Tosca au Festival de Verbier - Puccini au sommet - Compte-rendu
Qu’attendre de Verbier, effectivement, sinon l’excellence ? Elle a cette fois encore été au rendez-vous avec une Tosca prodigieuse, qui a tenu les spectateurs en haleine, et déclenché des salves d’applaudissements, tant la tension était grande. Pas de vraie mise en scène, - le lieu ne le permet pas -, mais une mise en espace, cette fois particulièrement périlleuse, les chanteurs disposant d’à peu près un mètre cinquante de large pour aller et venir devant l’orchestre, et Dieu sait que dans La Tosca l’on s’agite et l’on se débat !
La preuve est faite ici que même avec un orchestre encore vert, comme celui des jeunes du Verbier Festival Orchestra, étincelants individuellement, notamment les cors - divine surprise -, mais manquant encore de profondeur dans le tutti des cordes, l’on peut galvaniser un public.
Autres ingrédients de la recette : un chef passionné, Gianandrea Noseda, ressentant les articulations de cette musique dramatique avec toutes ses entrailles, chantant et lançant ses bras dans son dos pour diriger les chanteurs, lesquels ne le voient pas plus qu’il ne les voit. Tout est donc affaire de complicité et de musicalité. Rajoutons une Tosca voluptueuse dans ses robes de diva, Barbara Frittoli (photo), dont la voix n’est pas historique, mais dont la solidité et l’engagement scénique l’emportent sur un vibrato un peu trop présent. Tosca a bien le droit de trembler !
Face à elle un Scarpia qui devrait marquer les scènes internationales, bien qu’il ne soit pas un jeune homme, Ambrogio Maestri : voix de stentor qui sait se fait caressante et enjôleuse, présence énorme dans tous les sens du mot, jouant de sa corpulence et de sa stature comme d’une menace, arpentant son bout de scène avec un sens du temps dramatique considérable, le geste déployé avec une justesse spatiale et psychologique exemplaires. Ce devait être Bryn Terfel, qui eût sans doute fait du Bryn Terfel, c'est-à-dire intelligent et séducteur. Avec ce baryton frété en catastrophe en remplacement du grand Gallois, la soirée n’en fut que plus surprenante. Et que dire du jeune ténor Riccardo Massi (photo), remplaçant lui aussi Aleksandr Antonenko, prévu : sinon qu’on a bien rarement entendu ces dernière années, à l’exception de Jonas Kaufmann, un tel mélange de finesse et de subtilité mélodique, de velouté dans le timbre et de vaillance dans les aigus, sans une once de trompette ou de trémolo, et en y ajoutant une présence agréable et touchante, avec une allure des plus rentables. Ainsi affiné, le vérisme gagne encore en puissance, Puccini n’ayant pas divergé un seul instant de son but exclusivement dramatique ! Sans parler de la vigueur de l’énorme Collegiate Chorale, massée, tassée plutôt là où elle le pouvait.
Un tour de force qui doit beaucoup à l’intelligente et sobre mise en espace de Marthe Keller et d’Yves Lefèvre. Il montre que sans prétention, avec juste le respect et l’amour des œuvres, et de formidables interprètes, on peut oublier les contingences d’un plateau réduit à sa plus simple expression. Là est le vrai message de l’opéra, et non dans celui que lui rajoutent trop souvent des metteurs en scène bien payés, qui font des soirées de grève de machinistes des soirs de fête pour le public.
Jacqueline Thuilleux
Suisse, Festival de Verbier, le 24 juillet 2011.
www.verbierfestival.com (le festival se prolonge jusqu’au 31 juillet)
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Photo : Aline Paley
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