Journal
L’Egisto de Francesco Cavalli à l’Opéra Comique - Le roman du drame musical
Nouveau bonheur pour les amoureux du rêve baroque : Vincent Dumestre et Benjamin Lazar revisitent l'Egisto de Francesco Cavalli (1602-1676) sur la scène de l'Opéra Comique. Un spectacle hautement signifiant, car il permet de mesurer la rapide évolution des mentalités dans la connaissance d'un compositeur qui après avoir été en quelque sorte l'assistant du divin Claudio à Saint-Marc, fut le maître de l'opéra post-monteverdien à Venise, écrivant une trentaine d'ouvrages pour les théâtres à entrée payante, innovation majeure de la Sérénissime.
Donc Francesco Cavalli (né Caletti) il y a, qui avec Monteverdi, Lully et Purcell, doit être considéré comme l'un des acteurs majeurs de l'actuel retour aux opéras des origines.
C'est au Teatro San Cassiano que fut créée en 1643 cette «favola drammatica» aujourd'hui conservée dans deux copies différentes à Venise et à Vienne et qui compte plus que toute autre dans l'émergence d'un style vénitien à la scène, partagé entre opulence visuelle, goût de l'humour et de la burla (farce) et expressivité appuyée (l'argument narre les mésaventures de deux couples dont les dieux prennent plaisir à éprouver la constance amoureuse; avec comme thème majeur la folie d'Egisto et comme stimulants dramatiques travestissements, rapts et menaces qui disent le pouvoir de l'imaginaire sur les âmes, au fil d'une foule de rebondissements appelés accidenti verissimi!).
Sans surenchère, l'ouvrage est l'un des grands moments du Seicento à la scène et, par extension, du drame musical à ses débuts où tout tient dans la loi d'immitatione («imitare col canto chi parla»).
Très attentif à ces origines, le metteur en scène Benjamin Lazar est ici dans son jardin expressif, esthétique: éclairages à la bougie, travail sur les mots, sur le dire, sur la gestuelle et la lumière, outre une réflexion soutenue sur les symboles nuit contre jour, folie contre raison).
Autant de procédés dont Vincent Dumestre et son équipe du Poème Harmonique ont les clés, sans oublier les attraits du chant avec l'Egisto de Marc Mauillon, la Clori de Claire Lefilliâtre, la Climène d'Isabelle Druet et l'Ipparco de Cyril Auvity: un quatuor devant lequel les plus critiques rendront les armes.
Roger Tellart
Cavalli : L’Egisto
Les 1er, 3, 5, 6, 8 et 9 février 2012
Paris - Opéra Comique
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Photo : Per Buhre
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