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Itinéraire baroque en Périgord vert - Hommage au patrimoine - Compte-rendu
Cela fait désormais onze ans que Ton Koopman et ses amis sillonnent, le dernier samedi de juillet, les églises du Périgord vert, aux confins de l'Angoumois. Tout est parti d'un coup de cœur du musicien néerlandais pour ce pays verdoyant saupoudré d'édifices romans, parfois remaniés par le gothique, somnolant dans une indifférence d'où les réveillent ces itinéraires avec des concerts qui n'ont rien d'un faire-valoir – au contraire – repris cinq fois par les musiciens assignés à demeure d'un clocher pour les cinq groupes, chacun emblématisé par une couleur différente, qui se succèdent au long de la journée. Preuve s'il en est que rien ne vaut la musique vivante – et la convivialité qu'elle suscite – pour animer les vieilles pierres.
Après une mise en oreilles à Saint-Laurent de Mareuil sous les doigts organistes de Ton Koopman, généreux autant que limpides dans l'articulation des reprises du choral de Buxtehude « Wie schön leuchtet der Morgenstern » ou de la Pastorale en fa majeur BWV 590 de Bach, c'est pour un récital de viole de gambe que, sous la houlette du vert pour enseigne, commence notre parcours, à La Chapelle-Montabourlet. D'une fluidité admirable, l'archet de Mathilde Vialle galbe les rondeurs mélancoliques de la Suite en la mineur du Troisième Livre de Marin Marais, déclinant les nuances monochromes caractéristiques du compositeur français, avant de s'abîmer dans l'intériorité du Tombeau de Monsieur de Sainte-Colombe – tout en retenue et en élégance, que l'on retrouve dans La Rêveuse. Elle est remarquablement secondée par le touché sensible de Thibaut Roussel (théorbe) – auquel incombe un Prélude de Lemoyne – ainsi que par le clavecin efficace de Jean-Miguel Aristizabal, soliste quant à lui dans L'Attendrissante de Couperin. (photo)
La deuxième révélation de ce samedi se nomme Nicolas Achten, baryton belge de vingt-six ans qui s'accompagne à la harpe dans un programme Purcell que l'on aurait pu placer sous le patronage d'Alfred Deller en l'étonnant église Saint-Martin d'Argentine, au milieu d'un plateau hostile presque déserté après la cessation d'activité des carrières de pierre. Introduisant chaque pièce auprès du public, le chanteur allège opportunément l'émission pour faire goûter la fascinante délicatesse de O Solitude, Music for a while et The Plaint. Si elle manque peut-être d'incarnation théâtrale, cette fragilité qui se fige en une timidité souriante confine à la grâce.
Le sens du drame, c'est avec Bettina Pahn qu'on le trouve, à Saint-Pardoux de Mareuil, dans un récital de lieder préromantiques – Haydn, Zeller et Mozart – accompagnée par Tini Mathot sur un pianoforte André Stein de 1803, authentique jusque dans ses serrures, et qui fait sonner remarquablement les interrogations du Rondo en la mineur KV 511. A répertoire méconnu, bis mésestimé avec une autre page de Zeller, dans ce style contrasté et reconnaissable du Sturm und Drang, non teinté d'humour parfois, comme dans Die zu späte Ankunft der Mutter de Weisse (la trop tardive arrivée de la mère après le premier baiser de sa fille) mis en musique par Haydn.
Mentionnons également le violoncelle baroque de Piroska Baranyay dans la Sixième Suite de Bach à Connezac, ainsi qu'un aperçu de l'Allemagne de la seconde moitié du dix-septième siècle où domine la virtuosité du violon de Biber – par l'ensemble Colcanto à Saint-André des Graulges.
Gilles Charlassier
Mareuil /La Chapelle-Montabourlet/Connezac/Les Graulges/Argentine/Saint-Pardoux de Mareuil, 28 juillet 2012.
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Photo : DR
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