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Capriccio à l’Opéra de Paris - Michaela Kaune émerveille Garnier - Compte-rendu
En choisissant Capriccio pour tirer sa révérence en 2004, Hugues Gall terminait son mandat en beauté grâce au talent de Robert Carsen, tout en laissant le public réfléchir à l'infini sur la place et la suprématie supposée de la parole sur celle de la musique à l'opéra. Ce joli pied de nez salué et commenté à l'époque, nous avait permis de savourer une production – déjà reprise en 2007 (1) - que nous avons retrouvée avec plaisir samedi dernier, dans une distribution totalement renouvelée.
L'intrigue, transposée dans le Paris de l'occupation, c'est-à-dire au moment de la création de l'ouvrage (1942), se situe dans les coulisses du Palais Garnier, un thème cher à Carsen qui comme dans Tosca et Les contes d'Hoffmann trouve de subtils prolongements scéniques et dramatiques, théâtre dans le théâtre, illusion et caractère éphémère de la représentation y étant savamment exploités.
Nous avions laissé Philippe Jordan s'ébattre avec un bonheur non dissimulé dans les entrelacs straussiens d'Arabella en juillet dernier et attendions avec impatience sa lecture de Capriccio. Quelle joie de pouvoir suivre sans en perdre une miette les méandres de cette conversation en musique, où il est si facile de perdre le fil invisible qui unit les pensées intimes de chaque personnage. Grâce à lui, la partition palpite, s'embrase ou murmure, laisse à chacun le temps de douter, d'aimer ou de s'emporter dans un même élan, un bouillonnement intérieur et une conviction que rien ne peut arrêter. La comparaison avec la direction terne et brouillonne de Günter Neuhold n'en est que plus sévère, tant Jordan sait révéler la musique tout en restant au service du compositeur.
Construit pour et autour de la star Renée Fleming, le spectacle de Carsen reste un splendide écrin dans lequel Michaela Kaune accomplit des merveilles. Elégantissime, sa Madeleine au port aristocratique est autant un plaisir pour l'oeil que pour l'oreille. Phrasés sous contrôle, timbre moelleux et voix admirablement conduite, elle n'est pas sans rappeler Felicity Lott, elle aussi une inoubliable Comtesse, diseuse pleine de grâce, de poésie et d'émotions contenues.
Bo Skovhus met du temps à trouver ses marques, mais son Comte, séduit par la formidable Clairon de Michaela Schuster (bien plus à sa place que ne l'était Anne Sofie von Otter), termine la soirée sous de meilleurs auspices. Eternels « rivaux camarades », « amoureux ennemis », Joseph Kaiser (Flamand) et Adrian Eröd (Olivier) forment un « couple » juste et expressif sans pour autant faire oublier Rainer Trost et Gerald Finley, Peter Rose ne faisant qu'une bouchée du très payant rôle de La Roche, directeur de théâtre irrémédiablement tourné vers le passé.
Une première haut de gamme pour marquer le lancement de la saison au Palais Garnier.
François Lesueur
(1) avec Solveig Kringelborn, Olaf Bär, Charles Workmann et Tassis Christoyannis, dirigée par Harmut Haenchen.
R. Strauss : Capriccio – Paris, Palais Garnier, 8 septembre, puis les 11, 13, 16, 19, 22, 25 & 27 septembre 2012
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Photo : Opéra national de Paris/ Elisa Haberer
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