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The Rake’s Progress au Palais Garnier - Noir sur noir - Compte-rendu

Tiens, la Grande Boutique a ajouté un entracte à la sombre mise en abîme du Rake’s Progress selon Olivier Py. Découpage qu’on croirait plus logique, puisqu’il respecte les trois actes, mais qui pourtant brise l’élan d’un spectacle qui met justement un certain temps à trouver son rythme. Dommage, car du coup la soirée est un peu interminable et cet opéra qui est déjà le plus triste du répertoire – et le plus désabusé, le plus cynique aussi, vertus cardinales de l’ultime Stravinsky – s’étire jusqu’à l’asphyxie.

Est-ce le meilleur spectacle de l’auteur de Paradis de tristesse ? Pas vraiment, Py s’est contenté de coller son univers sur celui d’Auden, doublant sa noirceur d’un autre noir  C’est assez redondant, et souvent absolument sinistre, jusque dans la scène de la vente aux enchères à laquelle le commissaire priseur de Kim Begley refuse la moindre fantaisie. Oui, le sexe est triste, l’amour illusoire, et les pierres feront du pain pour nourrir une humanité vide de sens. La mort est partout, toujours, encore. Mais de là a en faire un opéra….et un spectacle. On se souvient de l’élégance, de la fantaisie, de la poésie que Robert Lepage avait introduit dans l’œuvre à la Monnaie de Bruxelles, lui donnant un tout autre élan.

On essayait donc de se rembourser avec la musique, mettant une bonne part de nos espoirs dans la direction de Jeffrey Tate. Las, sans influx, sans rythme presque, il laisse l’orchestre se déliter et parfois ne le fixe même pas par rapport à un plateau inégal.

Si l’on aime l’Anne ardente, émouvante, suprêmement bien chantée d’Ekaterina Siurina, si le Nick Shadow cauteleux de Gidon Saks nous étreint de sa basse creusée où les mots sonnent comme empoisonnés, si Jane Henschel reste incontournable en Baba la Turque malgré une voix en miettes, Charles Castronovo, pourtant artiste dans tout ce qu’il chante, nous déçoit un rien, ténor trop sombre, acteur trop impeccable. Il joue, il chante, il n’est pas ce personnage plein d’illusions et de fragilité qu’avait réussi le blond Tobby Spence lors de la création de cette production.

Reste que les aficionados de Py se réjouiront avec raison. Mais qu’ils n’oublient d’aller rendre leurs hommages à leur Dieu à deux pas de Garnier. Olvier Py retrouve au Théâtre de l’Athénée Miss Knife pour quelques soirées du 18 au 27 octobre.

Jean-Charles Hoffelé

Igor Stravinsky : The Rake’s Progress
Paris, Palais Garnier, le 16 octobre, prochaines représentations les 19, 22, 25, 28 et 30 octobre 2012.
www.operadeparis.fr

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Photo : Opéra national de Paris/ J.M. Lisse
 

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