On lui a passé un coup fil, début septembre, au sortir d’une répétition de L’Orfeo de Monteverdi qui va bientôt faire l’ouverture de la saison de l’Opéra de Dijon. Marc Mauillon savoure le soleil qui inonde la terrasse où il s’est installé, mais plus encore le bonheur de vivre, à 36 ans, l’accomplissement de certains rêves depuis le commencement d’une année 2016 dont on peut à coup sûr affirmer qu’elle restera gravée en lettres d’or dans son parcours.

Comme pour bien d’autres artistes lyriques qui occupent le haut de l’affiche aujourd’hui, William Christie avait vu juste en accueillant Marc Mauillon dans son Jardin des Voix dès le début des années 2000. « J’avais 22 ans, j’étais encore étudiant au Conservatoire, j’avais été nourri par les enregistrements des Arts Flo. La rencontre avec Bill a été un événement particulièrement marquant, qui m’a ouvert plein d’horizons, confie celui qui se remémore avec un émerveillement intact « la première grosse tournée de sa carrière. »

Depuis, le baryton s’est distingué dans des répertoires très variés, de la musique médiévale à la mélodie française. Reste que, à l’opéra, Marc Mauillon était jusqu’ici d’abord associé à la musique baroque, avec toutefois quelques formidables incursions dans la musique légère et le domaine contemporain - à commencer par un prodigieux Raulito dans Cachafaz de Strasnoy en 2010 à Favart. Le printemps dernier aura marqué un tournant dans son parcours avec la réalisation d’un de ses grands rêves : son premier Pelléas.

Il décrit cette prise de rôle (à l’Opéra de Malmö) comme « un grand rendez-vous avec lui-même », dont il est sorti « très heureux et avec une seule envie : celle de rechanter Pelléas le plus possible. » Cette production suédoise aura été l’occasion de sa première collaboration avec le jeune Maxime Pascal, « un chef génial, une personnalité inspirante et toujours à l’écoute », confie le chanteur. Sa joie n’était pas moins vive de retrouver à la mise en scène Benjamin Lazar, partenaire de longue date en qui il avait toute confiance. « C’est important quand on réalise une prise de rôle d’être ainsi entouré. »

Les conditions dans lesquelles se prépare L’Orfeo ne sont pas moins favorables. Marc Mauillon qualifie de « détendue et bienveillante » l’atmosphère de travail à Dijon. Avec ce Monteverdi, il retrouve un répertoire dont il est proche. Mais, d’un personnage dont il n’avait chanté que quelques airs, il embrasse cette fois la totalité. Il décrit le rôle comme « très équilibré, très organique ; on y entre vraiment. » Et d’ajouter : « la vision d’Yves Lenoir (que Marc Mauillon avait côtoyé alors que celui-ci était assistant d’Ivan Alexandre sur Hippolyte et Aricie au Palais Garnier ndr) est très séduisante ; elle nous nourrit beaucoup et questionne le mythe de façon originale.»

Le baryton est en terre amicale avec les Traversées Baroques car, s’il s’agit de sa première collaboration avec l’ensemble d’Etienne Meyer, il connaît à peu près tout ses membres individuellement, à commencer par une harpiste nommée ... Angélique Mauillon – sa sœur et régulière partenaire de récital.
En programmant L’Orfeo pour trois représentations, Laurent Joyeux fait de l’Opéra de Dijon l’objet de toute les attentions, du 30 septembre au 4 octobre. Le vrai événement lyrique régional de cette rentrée pourrait bien se situer dans la ville de Rameau ...

Mais l’année n’est pas finie pour Marc Mauillon. Après des concerts en duo avec sa sœur ou au côté du Poème Harmonique de Vincent Dumestre, puis un Mercure dans Orphée aux enfers (m.e.s. Ted Hufman, dir. Laurent Campellone) à Angers-Nantes Opéra, décembre sera marqué par la parution d’un récital monodique « Songline » (sur le label Le Petit Festival) et par des concerts à la POP (l’ex Péniche Opéra) et à Rouen (à la Chapelle Corneille), qui nous donneront l’occasion de revenir sur l’une de personnalités les plus singulières du chant français.

Alain Cochard
(Entretien avec Marc Mauillon réalisé le 7 septembre 2016)

Monteverdi : L’Orfeo
30 septembre, 2 et 4 octobre 2016 
Dijon – Auditorium
www.opera-dijon.fr
 
Site de Marc Mauillon : www.marcmauillon.com

Photo © Philippe Parent