Journal
Armida de Haydn à l’Opéra de Massy – Intelligence théâtrale - Compte-rendu
Inscrite dans une tournée de l’Arcal, l’Armida proposée à l’Opéra de Massy s’avère en tout cas exemplaire de la philosophie qui anime la compagnie fondée en 1983 par Christian Gangneron. Catherine Kollen a pris sa succession en 2009, poursuivant dans la voie d’« une exigence artistique forte où la partie musicale et la partie théâtrale sont à égalité » (1)
Théâtre et musique : on comprend dès l’ouverture qu’ils seront l’un et l’autre gagnants. A la tête de son tout nouveau Concert de la Loge Olympique (constitué de musiciens issus du Cercle de l’Harmonie), Julien Chauvin prend les choses en mains avec une énergie dénuée de brusquerie et met d’emblée du théâtre dans la musique. Jusqu’au terme de la soirée il porte l’action d’un geste dramatique aussi efficace que stylé, aidé il est vrai par le dynamisme et les timbres fruités de son ensemble, comme par la fluidité de la régie.
Deux camps s’opposent dans Armida : Mariame Clément a choisi les pro et les anti-mariage pour tous ! Cette translation dans l’actualité la plus récente en eût conduit d’autres à la caricature grossière ; elle permet à une metteuse en scène pleine de tact de rendre lisible et parlante l’intrigue pour le public d’aujourd’hui. Une profonde empathie envers l’ensemble des personnages émane de ce spectacle attachant, vivant et finement réglé. Adaptée à l’itinérance arcalienne, l’efficace modestie de la scénographie de Julia Hansen rappelle que l’intelligence théâtrale vaudra toujours mieux que l’abondance de moyens et d’effets.
Remarquable plateau ! Parfaite dans le redoutable emploi d’Armida qu’elle affronte avec un aplomb vocal admirable, Chantal Saton creuse la psyché de son personnage. Son incarnation très prenante et nuancée sonne d’autant plus juste que la soprano ne cède à aucune forme d’« hystérisation » du propos dans les moments les plus furieux – mais quel feu extraordinaire brûle dans le « Odio, furor, dispetto » ! Parfaitement apparié à sa partenaire, Juan Antonio Sanabria traduit à merveille les déchirements intérieurs de Rinaldo. Très belles surprises que l’Idreno sombre de Laurent Deleuil et la Zelmira de Dorothée Lorthiois. La soprano a fait du chemin depuis La Colombe de Gounod qui nous avait permis de la découvrir il y a quelques années à la Péniche Opéra. Prestation très convaincante aussi de la part d’Enguerrand De Hys (Ubaldo) dont l’engagement va de toujours pair avec une vocalité pleine de style. Rôle plus modeste, Clotarco montre Francisco Fernández-Rueda parfaitement à sa place au sein d’une équipe mue par un bel enthousiasme collectif.
Une seule représentation à Massy, mais la tournée d’Armida se poursuit heureusement jusqu’en mars (Orléans, Besançon, Clermont-Ferrand, Cergy-Pontoise, Niort). Si une occasion se présente à vous ne la manquez surtout pas !
Alain Cochard
(1)Lire l’interview de Catherine Kollen : www.concertclassic.com/article/arcal-la-plurisciplinarite-comme-mot-dordre-trois-questions-catherine-kollen-directrice-de
Haydn : Armida – Massy, Opéra, 23 janvier 2015 ; prochaines représentations 11 février (Orléans), 19 février (Besançon), 25 et 27 février (Clermont-Ferrand), 5 mars (Cergy-Pontoise) et 10 mars (Niort) - www.arcal-lyrique.fr/html/saisons_detail.php?prod=125
Site de l’Opéra de Massy : http://www.opera-massy.com
Photo ( Chantal Santon, à g. ; Juan Antonio Sanabria, à dr.) © E. Bertolucci
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