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Béatrice et Bénédict au Festival Berlioz 2022 —Vous avez dit opéra-comique ? – Compte-rendu
Béatrice et Bénédict au Festival Berlioz 2022 —Vous avez dit opéra-comique ? – Compte-rendu
Moment phare du Festival Berlioz 2022, l’opéra-comique Béatrice et Bénédict revient en version de concert l’avant-dernier jour de la manifestation. John Nelson, dont la réputation de spécialiste du compositeur n’est plus à prouver, est à l’œuvre devant l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, poursuivant avec cette phalange un parcours berliozien qui a déjà porté de beaux fruits (avec Les Troyens et La Damnation de Faust) (1).
Ultime œuvre importante de Berlioz, Béatrice et Bénédict se présente comme un opéra de chambre, d’une musique tout en délicatesse sur une trame évanescente d’amours innocemment contrariées (inspirée de Much ado about nothing de Shakespeare). D’où aussi sa difficulté : savoir maintenir la théâtralité légère de la pièce, tout en exhalant son parfum musical subtil. Contrat ici, dans l’auditorium provisoire sis dans la cour du château de la bourgade, non entièrement rempli. Nous y reviendrons.
© Bruno Moussier
La distribution n’appelle toutefois que des éloges, à quelques détails près. Sasha Cooke, pourtant déclarée « souffrante », s’empare de Béatrice avec superbe et ce qu’il faut de nuances. Vannina Santoni peine un peu dans le rôle de Héro pour ensuite mieux s’affirmer, en particulier dans sa participation aux aériens duo et trio féminins, avec l’appoint d’une excellente Beth Taylor (rôle épisodique d’Ursule). Toby Spence figure un Bénédict allant, bien que parfois en retrait de sa voix légère. Jérôme Boutillier plante un Claudio assuré, de même que Paul Gay pour Don Pedro. Alors que Julien Véronèse lance un bouffe Somarone avec la gouaille de circonstance, y compris pour ses tirades parlées.
Le chœur, constitué du Chœur Spirito complété du Jeune Chœur Symphonique, se fait pour sa part quelque peu criard dans ses premières interventions d’entrée, pour ensuite mieux se fondre (« Marche nuptiale » finale). Il est vrai qu’il est par trop étoffé de ses nombreux participants (à l’encontre du chœur de chambre souhaitable). Il en est de même du Philharmonique de Strasbourg en (trop) grande formation. D’où une sonorité un peu forte qui ne rend pas toujours justice au caractère diaphane de la musique. La direction de Nelson se fait pourtant des plus précises, emportée par des tempos vifs et une battue experte, pour un ensemble parfaitement en place.
La distribution n’appelle toutefois que des éloges, à quelques détails près. Sasha Cooke, pourtant déclarée « souffrante », s’empare de Béatrice avec superbe et ce qu’il faut de nuances. Vannina Santoni peine un peu dans le rôle de Héro pour ensuite mieux s’affirmer, en particulier dans sa participation aux aériens duo et trio féminins, avec l’appoint d’une excellente Beth Taylor (rôle épisodique d’Ursule). Toby Spence figure un Bénédict allant, bien que parfois en retrait de sa voix légère. Jérôme Boutillier plante un Claudio assuré, de même que Paul Gay pour Don Pedro. Alors que Julien Véronèse lance un bouffe Somarone avec la gouaille de circonstance, y compris pour ses tirades parlées.
Le chœur, constitué du Chœur Spirito complété du Jeune Chœur Symphonique, se fait pour sa part quelque peu criard dans ses premières interventions d’entrée, pour ensuite mieux se fondre (« Marche nuptiale » finale). Il est vrai qu’il est par trop étoffé de ses nombreux participants (à l’encontre du chœur de chambre souhaitable). Il en est de même du Philharmonique de Strasbourg en (trop) grande formation. D’où une sonorité un peu forte qui ne rend pas toujours justice au caractère diaphane de la musique. La direction de Nelson se fait pourtant des plus précises, emportée par des tempos vifs et une battue experte, pour un ensemble parfaitement en place.
© Bruno Moussier
Au chapitre des regrets, il faut surtout mentionner la présentation de l’œuvre : dépourvue (sauf pour Somarone) de ses dialogues parlés, remplacés par un pesant texte de liaison dit par un récitant (Éric Génovèse, bon diseur au demeurant). Il s’ensuit une rupture de la continuité butant sur ces interventions, mais aussi une incompréhension (pour qui ne connaît pas la trame) ; on ne sait ainsi le pourquoi du revirement de Bénédict, exprimant tout d’abord son dédain à Béatrice, pour ensuite chanter « Je vais l’aimer » ; comme on ne comprend pas que le mariage annoncé en toute fin, celui de Héro et Claudio, finisse par devenir celui de Béatrice et Bénédict (sur ces derniers mots : « Nous redeviendrons ennemis demain »).
Nelson avait enregistré l’œuvre il y a une trentaine d’années, un enregistrement de référence, incluant les dialogues parlés comme il se doit (2). On saisit alors mal le choix fait ici (alors même que La Flûte enchantée donnée la veille maintenait les dialogues, pourtant en allemand) (3). Le respect de ces dialogues (quitte à les abréger), et par là de la structure de l’œuvre, aurait peut-être nécessité un travail préparatoire en amont et davantage de répétitions. Est-ce l’explication ? Le résultat n’en reste pas moins frustrant. Un enregistrement semble prévu, qui cette fois cependant devrait maintenir les dialogues parlés d’origine. Heureuse chose !
Pierre-René Serna
Au chapitre des regrets, il faut surtout mentionner la présentation de l’œuvre : dépourvue (sauf pour Somarone) de ses dialogues parlés, remplacés par un pesant texte de liaison dit par un récitant (Éric Génovèse, bon diseur au demeurant). Il s’ensuit une rupture de la continuité butant sur ces interventions, mais aussi une incompréhension (pour qui ne connaît pas la trame) ; on ne sait ainsi le pourquoi du revirement de Bénédict, exprimant tout d’abord son dédain à Béatrice, pour ensuite chanter « Je vais l’aimer » ; comme on ne comprend pas que le mariage annoncé en toute fin, celui de Héro et Claudio, finisse par devenir celui de Béatrice et Bénédict (sur ces derniers mots : « Nous redeviendrons ennemis demain »).
Nelson avait enregistré l’œuvre il y a une trentaine d’années, un enregistrement de référence, incluant les dialogues parlés comme il se doit (2). On saisit alors mal le choix fait ici (alors même que La Flûte enchantée donnée la veille maintenait les dialogues, pourtant en allemand) (3). Le respect de ces dialogues (quitte à les abréger), et par là de la structure de l’œuvre, aurait peut-être nécessité un travail préparatoire en amont et davantage de répétitions. Est-ce l’explication ? Le résultat n’en reste pas moins frustrant. Un enregistrement semble prévu, qui cette fois cependant devrait maintenir les dialogues parlés d’origine. Heureuse chose !
Pierre-René Serna
(1) Chez Erato, 2017 et 2019.
(2) Toujours pour Erato, en 1992, réédition 2011
(3) www.concertclassic.com/article/la-flute-enchantee-au-festival-berlioz-2022-anime-retour-aux-sources-compte-rendu
Festival Berlioz, La Côte Saint-André, auditorium provisoire de la cour du château Louis XI – 30 août 2022
Photo © Bruno Moussier
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