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Carmen à l'Opéra de Toulon - Amoureuse Varduhi Abrahamyan - Compte-rendu
Ce n'est pas avec sa mise en scène sage, conçue par Jean-Philippe Delavault pour l'Opéra de Monte-Carlo, que se distingue la Carmen avec laquelle l'Opéra de Toulon ouvre sa saison. Ersatz d'agora méridionale avec ses clochers ou reliefs pierreux en guise de montagnes, le décor dessiné par Gerardo Trotti ne cherche pas l'iconoclasme et distille un kitsch sympathique. Cela ne l'empêche nullement de sertir efficacement l'ultime face-à-face entre Carmen et Don José, au dehors des portes de l'arène qui se referment sur eux comme un piège, tandis qu'Escamillo livre son combat dans l'arène.
La scène profite du charisme des deux protagonistes, et surtout de la fine caractérisation du personnage éponyme par Varduhi Abrahamyan. Sa Carmen, amoureuse de Don José jusqu'à la fin, avant qu'elle ne retire sa bague, arbore les couleurs attendues dans le rôle. Encore à froid dans la Habanera, elle s'épanouit dans une Séguedille enlevée et s'assombrit de manière prenante dans l'air des cartes. Calin Bratescu incarne un Don José impacté, avec un soupçon de nasalité. La blonde Tatiana Lisnic fait preuve en Micaëla d'une belle sensibilité, résumée dans un « Je dis que rien ne m'épouvante » de haute tenue. Tout en puissance, Alexander Vinogradov nous réserve un Escamillo matamore. Des seconds rôles se détachent Jean-Marie Delpas – diction et émission impeccables – et l'aérienne Frasquita de Diana Higbee, aux côtés de la Mercédès plus commune d'Aurore Ugolin. Moins convaincants se révèlent le Moralès peu élégant de Filip Bandžak, la prosodie appuyée du Dancaïre joué par Ivan Geissler, et l'émérite Rémy Corazza en Remendado.
Clef de voûte de la soirée, la direction du vrombissant directeur de la maison sait tirer le meilleur de ses troupes, qui s'élèvent au niveau des meilleures formations de province. Main de fer dans un gant de velours, Giuliano Carella insuffle une vitalité sans faille à cette Carmen avec récitatifs. Dans le fil de la continuité musicale ainsi restaurée de manière posthume pour se glisser dans les codes de l'opéra – version dite « de Vienne » –, le chef italien souligne avec finesse l'inscription du chef-d'œuvre de Bizet dans l'histoire de la musique française – ici Gounod, là Berlioz ou encore Massenet, voire Halévy. Mentionnons encore le travail des choeurs qui font un louable effort d'intelligibilité.
Gilles Charlassier
Bizet : Carmen – Opéra de Toulon, 12 octobre 2012
Site de l’Opéra de Toulon : www.operadetoulon.fr
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Photo : DR
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