« Color Gradient » (dégradé de couleur ) : sous un intitulé plutôt mystérieux l’enregistrement (1) que signent Lionel Andrey et Flore Merlin cache une magnifique anthologie de pages pour clarinette et piano embrassant un peu plus d’un siècle. De la toute fin du XIXe (l’Introduction et Rondo op. 72 de Widor – 1898) ou de l’orée du XXe (la Rhapsodie de Debussy – 1910) jusqu’à la création la plus récente (le délicat et nuancé Envol de Fabien Touchard - né en 1985), on trouve des pages connues telle que la fameuse Sonate de Poulenc et celle – moins courue tout de même – de Leonard Bernstein (de 1941-42, il s’agit la première œuvre publiée du chef et compositeur). On découvre aussi la Sonate du Suisse Daniel Schnyder (né en 1961) – initialement destinée au saxophone soprano et parfaitement à son aise à la clarinette – ; une partition marquée tant par le jazz que des influences plus balkaniques, à laquelle s’enchaîne tout naturellement la Pocket Size Sonata n° 1 du Gallois Alec Templeton (1909 ou 1910 – 1963), d’une irrésistible saveur jazzy.
 
Clarinettiste du Trio Eclipse (qu’il forme avec le violoncelliste Sebastian Braun et le pianiste Benedek Horváth), le Suisse Lionel Andrey convainc de bout en bout par son sens de la nuance et du dialogue ( que d’effusive poésie dans le Debussy et le Poulenc ! ). Ce chambriste accompli trouve en Flore Merlin une partenaire de premier ordre. Accoutumée à travailler avec des chanteurs, elle offre au clarinettiste un accompagnement remarquable de présence, de naturel, de précision et vigueur rythmiques aussi ( la Sonate de D. Schnyder, d’une foisonnante vitalité ! ). L’Envol de Fabien Touchard placé en conclusion a pour sous-titre Un sourire : c’est on ne peut mieux trouvé au terme d’un voyage musical aussi original que foncièrement heureux.
 
Notez que Lionel Andrey et Flore Merlin fêteront la sortie de leur disque le 26 mai à Paris, au Studio Le Regard du Cygne (75020, concert en entrée libre), avec un programme Debussy, Ravel, Martinu, Bernstein et Gershwin.
 
Alain Cochard