Ce beau programme Mitteleuropa composé d’un florilège de six Danses slaves d’Antonin Dvorák (1841-1904) et de La Petite Sirène d’Alexander von Zemlinsky (1871-1942) confirme le talent du chef russe Andrey Boreyko, né en 1957 à Saint-Pétersbourg et actuel directeur musical de l’Orchestre Symphonique de Düsseldorf. Son solide métier se vérifie dans sa manière très ferme d’aborder le répertoire tchèque, alternant coups de boutoir, virtuosité orchestrale, vitalité des tempi. On regrette cependant une tendance à brutaliser les rythmes et les oppositions d’humeurs avec une violence au knout évoquant davantage les danses folkloriques ukrainiennes que les danses slaves proprement dites. Manque à son approche cette saveur populaire issue des prés et des bois de Bohème, même si le lyrisme n’en est pas absent.

En revanche, l’exécution de la Fantaisie pour orchestre La Petite Sirène (1903) d’après le célèbre conte d’Andersen n’appelle que des éloges. Créé à Vienne en 1905 au côté du Pelléas et Mélisande de Schoenberg, le triptyque se déroule tel un long fleuve post-romantique touffu de trois quarts d’heure. Les influences brahmsienne, wagnérienne et straussienne se font sentir, mais l’on est sensible aussi à l’alliage des timbres et aux subtilités mélodiques.

L’Orchestre Philharmonique de Radio France se laisse emporter par ces effluves avec une tension palpable, une sensualité de ton et un engagement qui font plaisir à voir et à entendre. Malgré la clarté de la direction, la machine symphonique de Zemlinsky paraît parfois s’enliser dans les méandres d’une écriture somptueuse qui se regarde dans son propre miroir. Un témoignage de grande qualité néanmoins, inscrit dans le cadre de l’hommage rendu par Radio France cette saison au compositeur viennois auquel Schoenberg croyait tant.

Michel Le Naour

Paris, salle Pleyel, 28 janvier 2011

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Photo : DR