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Compte-rendu : Chat perché, « opéra rural » de Jean-Marc Singer - Une fantaisie animalière
Destiné au jeune public autant que le sont les contes de Marcel Aymé dont il s'inspire, l'« opéra rural » de Jean-Marc Singier et Caroline Gautier présenté à l'amphithéâtre de l'Opéra Bastille doit une sa réussite à la savante et joyeuse imbrication de ses protagonistes.
Point de barrières en effet dans cette ferme imaginaire, vision fantaisiste d'un Jura d'antan : les personnages, humains autant qu'animaux, y sont campés par des chanteurs, des acteurs, des acrobates, un danseur, les cinq musiciens de l'ensemble 2e2m et leur chef Pierre Roullier.
Si le prologue est quelque peu longuet, la musique de Jean-Marc Singier y donne tout de suite le ton : une fanfare inventive (saxophone, clarinette, trompette, trombone et percussions) qui au cours de l'œuvre multipliera les facéties rythmiques. De fait, la vivacité narrative et musicale n'a plus de cesse sitôt que le livret très habile de Caroline Gautier enchaîne deux des Contes du chat perché : « Le Paon » et « Le Canard et la panthère ».
Le ténor Marc Molomot, impayable en cochon gras voulant être mince et beau comme le paon puis en mauvais perdant des jeux de la ferme, symbolise bien l'ambiguïté de l'œuvre, entre sérieux et fantaisie. Dès sa première apparition, virevoltant sur scène, il met le jeune public dans sa poche. Caroline Gautier, qui signe la mise en scène, a visiblement pris plaisir – et les interprètes avec – à faire que chacun joue de son physique et de sa personnalité : le contre-ténor Robert Expert en paon du château poseur « Grand Siècle », la basse Michel Hermon et la mezzo Sylvie Althaparro, austères parents qui vouent mezzo voce le canard à la casserole et le cheval à la boucherie, Sonia Bellugi, volubile colorature, en canard intrépide et les contorsionnistes Anne-Claire Gonnard et Johanna Hilaire, ondoyantes gamines de la ferme.
Il n'est pas jusqu'aux musiciens qui ne contribuent – jouant qui la vache, qui la basse-cour – à la chorégraphie minimale et subtile de Dominique Boivin. La simplicité apparente de la scénographie laisse toute sa place à l'onirisme et à la magie visuelle quand la panthère – ramenée de voyage par le canard (l'une des plus belles ellipses de l'histoire de l'opéra) – meurt d'avoir dansé des heures durant dans la neige. Le solo de danse de Salomon Baneck-Asaro touche au merveilleux. L'adaptation ici se porte ici au même degré de poésie que l'œuvre originale.
Jean-Guillaume Lebrun
Jean-Marc Singier : Chat perché, opéra rural - Paris, amphithéâtre de l'Opéra Bastille, le 12 mars 2011
Prochaines représentations : les 22, 23 et 24 mars à Meyrin (Suisse), le 25 mars à Mâcon, les 27 et 28 mars à Vitry-sur-Seine, les 30 et 31 mars à Orléans, le 9 avril à Bonneuil-sur-Marne et le 15 avril à Vevey (Suisse)
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Photo : Daguet / Editions Henry Lemoine
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