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Compte-rendu : Le CNSMDP et Notre-Dame font alliance - Neuf chefs pour Bach

Elle-même lieu séculaire d'enseignement musical, la cathédrale de Paris a noué un partenariat pédagogique avec le Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. On se souvient d'un impressionnant concert en hommage à Messiaen, le 21 octobre 2008 : l'Orchestre du CNSM dirigé par Zsolt Nagy et la Maîtrise Notre-Dame de Paris dirigée par Lionel Sow avaient donné les Trois petites liturgies de la présence divine et le colossal (aussi en termes d'effectifs) Et exspecto resurrectionem mortuorum. Expérience concluante et réactualisée cette année lors d'un concert – à guichets fermés et parrainé par la Neue Bachgesellschaft de Leipzig – fêtant le début de l'Avent et du temps de Noël : Parties I à III de l'Oratorio de Noël de Bach qui, précisément, célèbrent la Nativité – les trois autres Cantates ont trait au Nouvel an, à la circoncision et à l'Épiphanie.

À la Maîtrise (Chœur d'adultes et Jeune Ensemble) répondait un orchestre issu des classes de musique ancienne des CNSM de Paris et de Lyon, mais aussi du CRR de Paris, du Conservatoire Royal de Bruxelles et de la Haute École de Genève. À leur tête se succédèrent pas moins de neuf chefs – dont une seule femme – revenant à tour de rôle, en formation dans la classe de direction d'orchestre de Zsolt Nagy au CNSM de Paris. Le travail préparatoire, intense session d'une dizaine de jours, avait été dirigé et coordonné par Lionel Sow, chef de chœur à Notre-Dame.

Répondant à une Maîtrise d'une fiabilité à toute épreuve, coutumière des lieux et de l'acoustique, l'orchestre fit redouter dans le Chœur initial un déséquilibre dynamique, fatal sur la durée mais bien vite corrigé – le temps, peut-être, que les instrumentistes se situent (et plus encore leur projection) dans l'immense espace, comble qui plus est, tâche particulièrement ardue pour les flûtes et hautbois baroques, momentanément noyés et peu audibles. Les trois parties de trompettes naturelles, redoutables même pour des exécutants aguerris (et il faisait affreusement froid), apportèrent leur lot de surprises dont, en dépit d'une justesse aléatoire, nombre d'attaques incisives et précises, des trilles périlleux négociés avec aplomb et une rythmique exemplaire, à aucun moment perturbée par les incertitudes de l'intonation.

L'œuvre vivement lancée, l'une des belles causes d'étonnement fut l'extrême continuité et homogénéité du propos musical, « malgré » la direction multiple, sous-tendue d'une approche instrumentale et vocale d'une vivante cohérence – on imagine le rôle joué par Lionel Sow, avec souplesse et exigence, dans cette unité d'intention, reflet d'un travail collectif abouti.

Côté solistes, les surprises furent tout aussi manifestes au sein d'une distribution de qualité, même si la prononciation pouvait parfois révéler une pratique par la force des choses encore fraîche. Voix souple, aux attaques sûres dans le registre supérieur, et chaudement timbrée de Safir Behloul, remarquable sur toute l'étendue de la virevoltante tessiture de l'Évangéliste ; soprano lumineux et ductile (d'une projection sans doute un peu légère en un tel lieu) de Cécile Grangier, d'une si belle aisance dans un duo soprano-basse de la Troisième Partie superbement conduit, avec Romain Daye, baryton à l'émission vive et spontanée, franchise qui gagnera à plus de douceur, cependant que le premier air de baryton était confié à Alain Buet, « senior » habitué de Notre-Dame ; enfin l'alto Yann Roland et le ténor Enguerrand de Salles de Hys, tout simplement enchanteurs, en particulier dans leurs airs respectifs de la Deuxième Partie : le chant lyrique selon Bach, animé d'un souffle instrumental permettant de décliner avec force et grâce toutes les facettes d'une ligne soutenue et ornementée au service du texte dramatique. On aurait bien été en peine, pour une prestation dite « d'étudiants », ne serait-ce que d'imaginer ce que Notre-Dame permit effectivement d'entendre ce soir-là. Les musiciens de demain, dès maintenant…

Michel Roubinet

Bach : Oratorio de Noël (Cantates I à III), mardi 30 novembre 2010, Paris cathédrale Notre-Dame, mardi 30 novembre 2010

Site Internet :
Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris – Concert du 30 novembre 2010
http://www.musique-sacree-notredamedeparis.fr

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