Parmi les chefs français, Louis Langrée jouit d’une réputation qui n’est pas usurpée tant ce musicien sait faire preuve d’imagination et de curiosité. Le programme qu’il dirige avec les musiciens de l’Ensemble Orchestral de Paris est d’une logique évidente au-delà des styles et des époques. Il associe en effet la Cantate BWV 150 de Jean-Sébastien Bach (1707) à la 4ème Symphonie de Brahms (1885) dont le final cite quelques mesures de cette œuvre du Cantor, ainsi qu’au Concerto n°3 de Bartók (1945) d’un classicisme sublimé.



L’interprétation de la cantate de Bach tient compte des apports baroques : absence de vibrato des cordes, sens de la danse. Dommage que cet entrain soit gâché par les solistes issus du Chœur de chambre Les Eléments, formation pour le reste excellente.



Au piano, le Suédois Peter Jablonski, moins préoccupé par le caractère percussif du Concerto n°3 de Bartók que par la subtilité des nuances, le dosage des sonorités (Andante religioso), présente une vision épurée de la dernière œuvre du compositeur hongrois (restée inachevée et terminée par son ami Tibor Serly). On retrouve la rigueur de ton et la poésie du concerto dans le Nocturne de Chopin joué en bis.



Dans la 4ème Symphonie de Brahms, l’élan qu’imprime Louis Langrée met parfois l’Ensemble Orchestral à rude épreuve, obligeant les musiciens à sortir de leurs gonds (Allegro non troppo initial, Allegro energico e passionato final). Le sentiment d’urgence, la vivacité des tempi, la transparence des lignes font ressortir le caractère haydnien et mozartien de l’auteur, loin des lectures massives et denses des grandes phalanges symphoniques. Un instant de fraîcheur et de grâce magnifié par cette exécution très pensée, d’une constante intelligence de conception.



Michel Le Naour



Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 26 octobre 2010

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Photo : DR