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La grande affabulation de Geoffroy Jourdain & Benjamin Lazar par la Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique – Rencontres fantastiques

 

 
La Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique est particulièrement à l’honneur avec La grande affabulation qui s’installe sur la scène de Favart du 10 au 16 mai prochains. Conçu par Benjamin Lazar et Geoffroy Jourdain – un tandem dont l’entente s’est illustrée à de nombreuses reprises – le spectacle se définit comme « une légende urbaine du XXIe siècle ».

Jusqu’à l’océan ...

Avec en exergue deux citations révélatrices, l’une de Rimbaud : « Je devins un opéra fabuleux » ; l’autre de Hugo : « Comme on fait son rêve, on fait sa vie », son argument est le suivant : « Alors que le spectacle à l’Opéra-Comique approche, une jeune chanteuse de la Maîtrise populaire est inquiète. Comme elle confie à son journal intime ses cauchemars et ses doutes, un être mystérieux, mi-jeune fille mi-oiseau, surgit devant elle. C’est la première des rencontres fantastiques de La grande affabulation, conte contemporain où l’héroïne, l’espace d’une nuit, va accompagner une troupe d’oiseaux, de sorciers, de chevaliers et de bêtes sauvages dans leurs aventures initiatiques, jusqu’à l’océan. »

 

Benjamin Lazar en répétition avec les maîtrisiens © S. Brion

Un travail de longue haleine

Un spectacle par et pour la Maîtrise populaire, sur lequel le metteur en scène et le chef des Cris de Paris travaillent depuis septembre dernier avec un groupe de quatre-vingts maîtrisiens de 12 à 20 ans. Travail de longue haleine donc, qui a conduit B. Lazar et G. Jourdain a d’abord observer les jeunes chanteurs (en classes à horaires aménagés) lors de divers ateliers préparatoires, étape qui a été l’occasion d’un tri parmi les pièces musicales initialement envisagées – la Renaissance et le baroque dominent largement et, point important, c’est la première fois que les maîtrisiens s’aventurent sur ce terrain. « Cette phase nous a permis de voir comment ils réagissaient à nos propositions, note B. Lazar. Ils ont fourni des histoires qui se retrouvent dans un spectacle qui a pris aussi en compte leurs personnalités, leur manières de bouger, leur énergie afin de constituer les différentes « familles » de La grande affabulation. »

 

Geoffroy Jourdain © Samuel Berthet

 
Travailler à partir du collectif
 
Ecoute et adaptation ont été des maîtres mots dans l’élaboration d’une spectacle modulable, tant sur le plan scénique (Adeline Caron signe les décors) que musical, «en fonction des réalités d’un protocole d’écriture au plateau.» Adaptabilité qui a aussi amené G. Jourdain a effectuer certains arbitrages entre le vocal et l’instrumental (les musiciens des Cris de Paris sont en fosse). « Nous sommes partis d’un collectif de quatre-vingts personnes dont nous savions que certaines individualités se détacheraient, remarque le chef, mais notre propos restait de raconter quelque chose à partir du collectif que nous avions à notre disposition. Pour raconter le passage de l’enfance à l’adolescence et comment, plus tard, on est en capacité de garder nos rêves d’enfance. »
 
« Depuis le début ils nous impressionnent ! », lancent d’une même voix les deux concepteurs de La grande affabulation.  Accoutumés à travailler avec des adultes, ils auront fait là une expérience singulière. « Entre septembre et aujourd’hui, nous avons vu des jeunes changer énormément, des maturités arriver, confie B. Lazar. J’ai aussi été touché – c’est l’une des vertus de Maîtrise – par le dialogue, le sens de l’écoute entre ces jeunes. ». Expérience singulière et enrichissante pour des professionnels qui, partant, sont aussi amenés à se poser des questions sur l’exercice de leur art : « qu’est-ce que l’on transmet et qu’est-ce que transmettre ? ».

 

© S. Brion 

Dans l’histoire de l’Opéra-Comique
 
Un spectacle avec la Maîtrise populaire de l’Opéra-Comique qui s’inscrit pleinement dans l’histoire de l’institution à laquelle cet ensemble se rattache. Les maîtrisiens sont des artistes complets qui, outre le chant, pratiquent la danse, le théâtre, les claquettes. « La grande affabulation raconte aussi l’histoire de l’opéra-comique par son mélange de théâtre parlé et de chant, et dessine un portrait de la Maîtrise et des maîtrisiens. »
Admiratifs de leur énergie, B. Lazar et G. Jourdain ne manquent pas de souligner combien elle se nourrit de l’implication totale des équipes du Comique dans la mise en œuvre du projet. Les participants vont d’ailleurs porter sur eux une part de l’histoire de la maison du boulevard des Italiens : les costumes de La grande affabulation sont en large partie issus des réserves du Comique, signés Blanchot, Carsen ou Makéïeff par exemple, et c’est à Adeline Caron qu’est revenue la tâche – en rien simple, contrairement à ce que le mot récupération peut laisser supposer – de les adapter.
 
La grande affabulation ou comme retrouver l’esprit des « fables en musique » de l’opéra naissant, à partir de pièces signées Solage, Janequin, Costeley, Lassus, Lejeune, Monteverdi, Strozzi, Purcell, mais aussi Mozart, Britten ou Riley, confiées à de talentueux adolescents musiciens du début du XXIe siècle. Attention, si le spectacle tient l’affiche du 10 au 16, il ne comporte que deux dates à 20h, les 10 et 16 mai.
 
Alain Cochard

 

(Entretien avec Benjamin Lazar et Geoffroy Jourdain réalisé le 28 avril 2025)
 
G. Jourdain & B. Lazar : La grande affabulation
Création sur des musiques de Solage, Costeley, Janequin, Lassus, Lejeune, Monteverdi, Strozzi, Purcell, Mozart, Britten & Riley
10 et 16 mai ( 20h), le 11 mai (15h), 12 et 15 mai 2025 (14h40)
Paris – Opéra-Comique
www.opera-comique.com/fr/spectacles/la-grande-affabulation
 
Photo © Eva Miquet

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