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Compte-rendu : Louis Robilliard à Notre-Dame de Paris - Entre rigueur symphonique et décantation poétique
Après Campra et son Requiem en ouverture de saison, Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris invitait Louis Robilliard pour le récital de rentrée – on garde puissamment en mémoire son concert de 1993, sur l'orgue restauré de Notre-Dame, magnifié par sa propre transcription de L'Île des Morts de Rachmaninov. Impossible d'imaginer musicien moins enclin à briller pour lui-même, le corollaire, pour l'auditoire, étant impérativement de venir pour la musique, sans espérer de spectacle pyrotechnique, même si le virtuose en lui est de tout premier plan – moyen musical, certes pas finalité. Seule la musique importe (et le mystère qui en émane), « souffle imperceptible d'une autre vie, occulte, insondable » – citation la plus révélatrice de l'art de Louis Robilliard et du climat de ses récitals : il faut savoir qui l'on vient écouter pour éviter tout quiproquo. Concentration et modération sont les qualités premières de son approche, sans masquer une énergie formidablement canalisée, vouée à l'accomplissement de l'œuvre. Rares sont les musiciens qui, au service d'un texte, en déploient aussi résolument et avec une plénitude architecturale aussi élaborée toutes les composantes.
César Franck et ses Trois Pièces « du Trocadéro » (1878) ouvraient la soirée : Fantaisie en la majeur, Cantabile, Pièce Héroïque. Dans le jeu détente-tension, le premier élément fut indéniablement privilégié, le second trouvant néanmoins à s'exprimer par une appropriation bien réelle du vaisseau et de son acoustique. La grandeur, stricte mais entière. En guise de délicieux entremets : Sicilienne de Pelléas et Mélisande de Fauré, transcrite par Robilliard, moment d'intense pureté sonore rehaussée du charme incomparable des flûtes harmoniques de Cavaillé-Coll. Un flux poétique ouvrant sur un subtil univers onirique. La seconde partie fut une immense surprise : la difficile (d'accès, d'écoute) Dixième Symphonie, « Romane » (1900), de Charles-Marie Widor. D'une hypnotique mobilité dans le Moderato initial et d'un grandiose engagement dans le Finale, Robilliard, dans les Choral et Cantilène médians, orienta de nouveau l'auditeur, émerveillé de faire ainsi corps avec la musique et le lieu dans lequel l'interprète la projette, vers un monde intérieur d'une richesse insoupçonnée. Enthousiaste et debout lors des rappels, le public fut gratifié en bis, comme Robilliard en a coutume, d'un sobre Choral de Brahms. Le Widor le plus décanté surmontera-t-il l'absence du lieu, si consubstantiel à l'interprétation, lors de sa diffusion sur France Musique ? On se posait la question in situ et l'expérience vaut assurément d'être tentée : rendez-vous le 4 janvier 2011, pour inaugurer le cycle consacré par Benjamin François à Cavaillé-Coll (bicentenaire de sa naissance) dans Organo Pleno.
Michel Roubinet
Premier des quatre récitals d'orgue (en soirée) de la saison 2010-2011, mardi 12 octobre 2010, cathédrale Notre-Dame de Paris.
Sites Internet :
Musique Sacrée à Notre-Dame de Paris, concert du 12 octobre 2010 http://www.notredamedeparis.fr/Recital-d-orgue-par-LOUIS
Discographie de Louis Robilliard http://www.france-orgue.fr/disque/index.php?zpg=dsq.fra.rch&ior=1&org=Lo...
Organo Pleno / France Musique / Programme des mois à venir http://sites.radiofrance.fr/francemusique/em/organo-pleno/avenir.php?e_i...
Photo : D. R.
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