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Compte-rendu : Sous le signe de Franck - François Dumont et le Quatuor Debussy
Les ouvrages rares, ceux du répertoire français en particulier, doivent beaucoup à la programmation musicale que Pierre Korzilius élabore, le plus souvent en synergie avec les expositions temporaires d’Orsay et, dans tous les cas, en s’inscrivant dans la période chronologique couverte par le musée.
Pour les raretés, les curieux sont requis, tant du côté du public - que l’un des très rares lieux de musique classique de la rive gauche a su durablement fidéliser – que des interprètes. En ce domaine, Orsay a déjà pu à plusieurs reprises faire confiance au Quatuor Debussy. A la fin de saison dernière, la formation avait par exemple relevé le défi du redoutable Quatuor à cordes de Florent Schmitt. Cette fois, le dernier volet du cycle « Ensor et la musique » l’aura conduite à se plonger dans le méconnu Quatuor à cordes de Guillaume Lekeu.
Après une interprétation grave et recueillie du Molto Adagio du musicien belge (fauché par le typhus à seulement vingt-quatre ans), les Debussy abordent avec le Quatuor une œuvre certes inégale mais qui mérite la découverte. Dans le premier mouvement, le voisinage intimidant des maîtres (Franck et D’Indy), le désir de « sérieux » aboutissent à un résultat excessivement touffu et très incommode pour les exécutants. On aurait toutefois tort de se laisser rebuter par ce premier volet car, par la suite, le naturel du jeune compositeur reprend le dessus dans une réalisation en six parties où l’on remarque en particulier le lyrisme vibrant de la 2ème, la fraîcheur presque « dvorakienne » de la 3ème , au cours duquel le violoncelle (très gâté par Lekeu !) déploie une belle mélodie sur les figurations des trois autres instruments, ou encore un cinquième mouvement d’une badine fluidité où les interprètes se révèlent une fois de plus d’une grande justesse de caractère.
Reste à entendre après la pause le Quintette avec piano de Franck pour lequel les Debussy s’associent à François Dumont. Autorité, chaleur expressive : dès son entrée on comprend que le jeune pianiste lyonnais est bien là, totalement prêt à assumer son rôle de colonne vertébrale d’une partition où il importe de trouver le point d’équilibre entre le lyrisme et l’allant - trop de l’un conduisant à un côté fin de siècle suranné, trop de l’autre finissant par étouffer le chant et nuire à la mise en valeur de la polyphonie. Dans un parfait dialogue, François Dumont et ses partenaires déjouent ces pièges. Ils apportent à l’ouvrage une limpide et virile ardeur ; le système cyclique du « Pater seraphicus » tourne rond ! Belle conclusion à un voyage réussi au temps des heures glorieuses de la Société nationale de musique.
Alain Cochard
Paris, Musée d’Orsay, 28 janvier 2010
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Photo : DR
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