Pour le concert de clôture de la 6^e édition de son Festival « Aux Armes, Contemporains ! », la Scala-Paris confronte les compositeurs Philippe Hersant (né en 1948) et Benoît Menut (né en 1977). Deux créateurs de générations différentes mais que tout rapproche dans leurs esthétiques laissant une large part à la séduction sonore, et qui par ailleurs se côtoient souvent depuis vingt-cinq ans. Le programme réunit ainsi une œuvre de Menut, Depuis les rivages, écrite en hommage à une œuvre d’Hersant, Chant de l’isolé, pour une même formation concertante et une même durée. Ces deux ouvrages servent de cadre à une autre pièce de chacun des musiciens.
 

Philippe Hersant © 3foisC 
 
L’ensemble est à la charge du Trio Karénine (photo) et de l’Orchestre Royal de Chambre de Wallonie (mené par Vahan Mardirossian, son directeur musical depuis 2020), dans des textures variées autant que raffinées. Chant de l’isolé emprunte son titre au poète autrichien Georg Trakl (Gesang des Abgeschiedenen, 1914), pour piano, violon, violoncelle et orchestre à cordes, dans un déroulement quasi narratif emprunt d’un certain mystère. Depuis le rivage, s’inspire pour sa part du poème éponyme du Finlandais Pentti Holappa, triple concerto pour trio avec piano, percussions et orchestre à cordes, dans un caractère expansif.
 

Benoît Menut © Bernard Martinez
 
Ces deux réalisations encadrent donc Les Allées sombres de Menut et les Fantaisies sur le nom de Sacher d’Hersant (aboutissement d’un ouvrage d’abord conçu pour trio en 2008, puis adapté pour orchestre à cordes en 2013). La première pièce fait référence à l’auteur russe Ivan Bounine et à sa nouvelle éponyme, constituant le Trio n°2 pour violon, violoncelle et piano de l’auteur (dont les Karénine avaient assuré la création en 2013), dans une facture pointilliste vite devenue lyrique. En huit sections aux climats variés, la partition d’Hersant fait quant à elle référence à Paul Sacher, à partir d’un motif de six notes correspondant – "avec quelques entorses, précise l'auteur – aux lettres du patronyme du célèbre chef et mécène suisse.
 

Vahan Mardirossian © vahanmardirossian.com
 
Le Trio Karénine (Charlotte Juillard, Louis Rodde, Paloma Kouider) n’est pas en reste de ferveur, de même que l’Orchestre Royal de Chambre de Wallonie, sous la direction incisive de Vahan Mardirossian. Un programme à retrouver, à l’identique et par les mêmes interprètes, dans un enregistrement tout juste paru chez Mirare. (1)
 
Pierre-René Serna