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Coup de cœur Carrefour de Lodéon & Concertclassic - Kotaro Fukuma, pianiste - Un Japonais en Espagne
Le très bel enregistrement de la suite Iberia d’Albéniz réalisé en 2007 par Kotaro Fukuma pour le label Harmony n’était jusqu’ici disponible qu’au Japon. On se réjouit d’apprendre que Hortus (dist. Codaex) le diffuse désormais en France (1). D’aucuns découvriront peut être le pianiste japonais à cette occasion, mais il n’est plus un inconnu depuis un bon moment déjà pour les mélomanes attentifs aux talents de la nouvelle génération. On avait déjà accès en France à deux enregistrements de lui (une intégrale des Novelettes de Schumann et l’œuvre pour piano de Takemitsu, Naxos) et il s’est assez souvent produit chez nous (au Festival d’Auvers-sur-Oise, à Piano en Valois-Angoulême par exemple). Ce sera à nouveau le cas le 12 mai à l’Orangerie du Château d’Arnouville (95), puis le 12 juin à Paris (au Goethe Institut). Concertclassic a plus d’une fois mis l’accent sur le talent de l’interprète japonais et s’associe aujourd’hui à Carrefour de Lodéon pour un « coup de cœur » à un virtuose éblouissant doublé d’un musicien d’un raffinement, d’une sensibilité et d’une culture peu ordinaires.
Né en 1982 dans la banlieue de Tokyo, Kotaro Fukuma n’est pas issu de parents musiciens (un père informaticien, une mère professeur d’anglais) mais, avec deux sœurs aînées pianistes, l’envie lui vient rapidement de se mettre au clavier. A cinq ans, le voilà à l’œuvre sous la conduite de Kyoko Sato, un excellent professeur qui le fait débuter dans les meilleures conditions. Les progrès sont rapides : à huit ans, la gamin a toutes les Valses de Chopin dans les doigts. Deux années plus tard, il poursuit sa formation avec Kazumi Igeta, une pianiste habituée à accompagner les chanteurs. « L’essentiel pour elle était de chanter avec le piano, se souvient K. Fukuma, elle me poussait aussi à faire fonctionner mon imagination, à associer des images à la musique.» De profitables conseils …
A 14 ans, un concours international pour jeunes pianistes à Salt Lake City vaut un 6ème Prix à K. Fukuma. « C’était une grande récompense, car je ne m’attendais pas à arriver en finale », avoue-t-il. Après l’énoncé du palmarès un membre du jury lui fait part de son émotion et l’encourage vivement à s’engager dans une carrière musicale. Un déclic se produit ; sa motivation va croissant et il commence à songer au Conservatoire de Paris.
K. Fukuma passe avec succès l’épreuve d’entrée de l’institution de La Villette en 2001. Il a 18 ans et il lui faut s’acclimater à Paris – et aux Parisiens … Tâche parfois rude pour celui qui se heurte encore à la barrière de la langue française – obstacle qu’il va surmonter de façon assez stupéfiante pendant le temps passé dans la capitale. Mais K. Fukuma se souvient d’abord de « la gentillesse et de l’attention à ses élèves » de Bruno Rigutto, son professeur de piano. Hervé Billaut (l’assistant de B. Rigutto) et Marie-Françoise Bucquet (son professeur de musique de chambre) apportent beaucoup aussi à un artiste qui n’a pas oublié le défi que lui a lancé son père au moment où il s’est établi en France : « Tu as deux ans pour gagner un grand concours international, sinon tu rentres à Tokyo et tu choisis une voie plus sûre ».
Le 2ème prix au Concours d’Helsinki (augmenté du prix spécial Rautavaara) en 2002 ne suffit pas à M. Fukuma père. Le jeune homme ne baisse pas les bras : en août 2003 il remporte le 1er prix du Concours de Cleveland (avec le 1er Concerto de Brahms pour la finale avec orchestre). Ce trophée a définitivement raison des réticences paternelles ; K. Fukuma sait que désormais sa voie est tracée. La victoire à Cleveland ne lui fait cependant pas tourner la tête. Il termine d’abord son cursus à Paris (en 2005) et part ensuite étudier jusqu’en 2009 à l’Université des Arts de Berlin auprès de Klaus Hellwig, tout en travaillant ponctuellement avec des artistes tels que Mitsuko Uchida, Leon Fleisher, Aldo Ciccolini, Richard Goode, Dimitri Bashkirov, etc., et en menant une déjà active carrière de concertiste dans divers pays. Au Japon, aux Etats-Unis, à la France ou à l’Afrique du Sud s’ajoute l’Espagne à la suite d’un 3ème Prix au Concours de Santander en 2008.
Plus que de cette récompense – car K. Fukuma n’a franchement rien d’une « bête de concours » -, c’est de l’accueil ému du public espagnol devant lequel il se produit très régulièrement depuis qu’il préfère parler. Belle marque de reconnaissance il est vrai pour celui qui se passionne pour l’Espagne et sa musique (flamenco inclus !), Albéniz en particulier, depuis très longtemps. Découvert à l’âge de six ans, le fameux Tango du susnommé en a été le point de départ. A l’époque des études à Paris K. Fukuma approfondit sa connaissance d’Albéniz et d’Iberia, grâce à Hervé Billaut et au baryton Jorge Chaminé. Epoux de Marie-Françoise Bucquet, ce dernier stimule la passion du Japonais pour le maître espagnol. Lavapiés figure d’ailleurs au programme de l’épreuve de sortie du Conservatoire de K. Fukuma ...
Les enregistrements d’Alicia de Larrocha éblouissent par ailleurs un interprète qui voyage à plusieurs reprises en Espagne pour mieux apprivoiser sa musique et sa langue. En 2006, K. Fukuma réalise l’un de ses rêves : une rencontre avec Alicia Larrocha. Déjà très affaiblie, la pianiste ne peut plus se mettre au piano mais donne de très précieux conseils à son jeune collègue et, surtout, chantonne la musique « d’une voix faible et émouvante. » « En l’écoutant, j’ai senti toute l’âme espagnole ; c’était un moment d’une grande profondeur », se souvient-il.
En 2006 également, un récital au Japon constitue le point de départ de l’enregistrement d’Iberia. Enthousiasmé par son interprétation du 3ème Cahier, le directeur du label Harmony propose à K. Fukuma d’enregistrer l’intégralité de l’ouvrage d’Albéniz et, en octobre 2007, l’artiste confie aux micros l’interprétation que la France découvre enfin.
Pleine caractère et de noblesse, elle est toute à l’image d’un artiste bien décidé à poursuivre l’exploration de cette musique espagnole que le fascine tant. Les Nuits dans les jardins d’Espagne de Manuel de Falla, par exemple, font depuis longtemps partie de la bonne quarantaine d’œuvres concertantes qu’il compte à ce jour à son répertoire et, le moment venu, il pourrait bien nous surprendre du côté de chez Granados…
En ce moment Debussy occupe beaucoup K. Fukuma. Il vient en effet de réaliser pour Denon-Columbia un magnifique récital sur un Steinway de 1912. Puisse le marché européen y avoir accès - au même titre que le fulgurant programme lisztien « Ab irato » édité par Harmony à la veille du bicentenaire Liszt !
Mais c’est d’abord en concert qu’il vous faut apprécier le jeu tout à la fois poétique, électrisant et sensuel d’un pianiste qui a su prendre le temps de mûrir son art et d’élargir son répertoire sans jamais brûler les étapes. Ajoutons-y six langues parlées couramment : K. Fukuma peut envisager l’avenir avec confiance. Avisé en matière de jeunes talents, le Festival « Piano aux Jacobins » de Toulouse ne s’y est d’ailleurs pas trompé et a retenu l’artiste japonais pour une tournée en Chine (Pékin, Shanghai, Wuhan, Zhengzhou), fin-mai début-juin, en compagnie d’Adam Laloum et des jazzmen Jacky Terrasson et Philippe Léogé.
Alain Cochard
(1) 2 CD Hortus 093
Actualité de Kotaro Fukuma
Showcase et mini-récital à la FNAC Parly 2 (Le Chesnay)
5 mai 2012 – 16h (entrée libre)
www.fnac.com
Récital à l’Orangerie du Château d’Arnouville
(Œuvres de Chopin, Liszt, Fauré, Albéniz, Debussy, Ravel)
12 mai 2012 – 20h 30
Arnouville-les-Gonesse (95400)
Tél. : 01 34 45 97 19
Rencontre-dédicace
13 mai 2012(de 11h à 12h30 et de 14h à 16h)
Stand du Festival d’Auvers-sur-Oise
Salon Musicora
Paris – Palais Brongniart
Récital au Goethe Institut
12 juin 2012 – 20h
(Œuvre de Bach, Schumann, Debussy, Ravel, Albeniz)
17, avenue d’Iéna, Paris 75016
Tél. : 01 44 43 92 30
Récital au Festival de piano de Biarritz-Arcangues
1er août 2012
Récital au Festival «Classique au Port « / La Rochelle
3 août 2012
Récital au Victoria Hall de Genève
3 octobre 2012
Site de Kotaro Fukuma : www.kotarofukuma.com
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