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Cupid and Death de Matthew Locke et Christopher Gibbons par l’Ensemble Correspondances à l’Athénée – La confusion des dards – Compte-rendu
© Alban Van Wassenhove
Evidemment, on peut supposer que ces premiers spectacles lyriques londoniens étaient montés avec un faste visuel et sonore destiné à en mettre plein la vue et l’ouïe des invités de marque. Mais dans la mesure où le livret de ce maske signé James Shirley mélange allègrement le sublime et le grotesque, on comprend que Jos Houben et Emily Wilson aient décidé de privilégier la bonne humeur. L’histoire, inspirée d’Esope, de Cupidon et de la Mort échangeant par mégarde leurs flèches dans une auberge, avec toutes sortes de résultats imprévus – les amoureux meurent, les ennemis jurés s’aiment – trouve son dénouement avec l’intervention de Mercure : désormais, l’amour ne décochera plus jamais ses flèches parmi les riches et les puissants, et la mort n’atteindra plus ceux auxquels leurs exploits artistiques ou autres ont valu la gloire…
Le spectacle, destiné à tourner un peu partout en France, est donc léger : de la part des metteurs en scène, beaucoup d’inventivité et d’humour (notamment autour du bilinguisme du spectacle !), mais dans un décor « pauvre » constitué de praticables, de portants, de panneaux de contreplaqué constamment déplacés par deux techniciens ainsi que par l’ensemble des artistes, et des costumes mélangeant les époques et les styles, avec un clin d’œil au look Deschiens, notamment pour les instrumentistes qui, eux aussi, bougent sans cesse sur la scène.
© Alban Van Wassenhove
Neuf instrumentistes, c’est sans doute peu pour cette musique, et l’on imagine qu’un ensemble plus étoffé pourrait plus aisément varier les couleurs. On rêve aussi de chorégraphie pour les danses, mais il se passe bien assez de choses sur le plateau pour y suppléer. Et les six chanteurs et deux comédiens semblent se démultiplier tant ils sont actifs à chaque instant, associant leurs voix (même les instrumentistes chantent parfois) ou se détachant pour quelques interventions en solistes. Le baryton Nicholas Merryweather (photo à dr.) hérite d’un important rôle parlé, qu’il déclame avec une volubilité impressionnante, mais bénéficie aussi d’une grande scène comique chantée. A l’inverse, le ténor Antonin Rondepierre se fait surtout entendre dans les ensembles. Yannis François, désormais presque plus connu comme musicologue et concepteur de programmes de disque, a droit à plusieurs solos, dont le grand discours final de Mercure qui vient rétablir l’ordre dans un univers perturbé.
Du côté des voix féminines, les deux sopranos sont relativement peu sollicitées, mais Perrine Devillers séduit dans les airs qui lui sont confiés, la palme de l’humour revenant à Lieselot De Wilde dans son rôle de sous-titreuse. Lucile Richardot, enfin, brille en tragédienne, son timbre somptueux faisant merveille dans le monologue de la Nature éplorée par la confusion des dards.
Laurent Bury
Photo © Alban Van Wassenhove
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