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Doctor Atomic de Johns Adams l’Opéra National du Rhin – Cohérent et abouti – Compte-rendu
Les mélomanes alsaciens retrouvent le sourire. Après un plus que très contestable Vaisseau Fantôme selon Nicolas Brieger et un Roi Arthus littéralement massacré par Keith Warner, l’Opéra National du Rhin vient de présenter un remarquable Doctor Atomic signé Lucinda Childs.
Chorégraphe de l’ouvrage de John Adams lors de sa création à San Francisco en 2005, l’artiste américaine fait équipe avec Bruno de Lavenère (décors et costumes), David Debrinay (lumières) et Etienne Guiol (vidéo). Car c’est bien d’un travail d’équipe dont il est question ici. On aurait sans doute pu rêver d'une direction d’acteur parfois plus affûtée mais l’efficacité du décor unique, et la pertinence de la partie vidéo – essentielle dans cette production - aboutissent à un résultat aussi fluide que convaincant.
Nous avions déjà eu l’occasion d’attirer l’attention sur Etienne Guiol à l’occasion du spectacle pour enfants « Le Coq d’or » donné par les Percussions-Claviers de Lyon en 2012 au Théâtre de la Croix Rousse (1) – et repris en juin prochain à Paris au Théâtre des Abbesses. Depuis, le jeune vidéaste a participé à divers spectacles lyriques tant en France qu’à l’étranger et mûri son talent. Sa contribution au Doctor Atomic strasbourgeois donne l’exemple d’une imagination en rien narcissique et – immense qualité s’agissant de la vidéo à l’Opéra - toujours en phase avec le propos dramatique et musical. Mention spéciale pour l’intimiste scène 2 de l’Acte I !
En tête de distribution, Dietrich Henschel campe un Robert Oppenheimer par trop nonchalant, c’est le point faible de ce Doctor Atomic. Mais, au bout du compte, l’émotion que le baryton nous a procurée dans « Batter my heart » conduit à tempérer les réserves à son encontre. Pas simple il est vrai d’endosser le rôle après le magnifique Gerald Finley (1). Le reste du plateau est tout simplement parfait : à côté du mémorable Général Groves de Peter Sidhom, Robert Bork (Edward Teller) et Marlin Miller (Robert Wilson) offrent des incarnations psychologiquement très fines. Côté féminin, Anna Grevelius incarne une bouleversante Kitty Oppenheimer d’une voix pleinement épanouie, tandis que Jovita Vaskeviciute imprime une lunaire étrangeté à sa Pasqualita.
Bien préparés par Sandrine Abello, les Chœurs de l’OnR s’impliquent remarquablement. A la baguette enfin, Patrick Davin sert la partition de avec autant de tact et de sens dramatique que de précision. Il en faut dans une aussi foisonnante musique – on se demande parfois si les détracteurs de John Adams ouvrent les oreilles… Les progrès accomplis par l’Orchestre symphonique de Mulhouse depuis l’arrivée de son nouveau directeur musical sont patents et contribuent pour beaucoup aussi au succès d’un Doctor Atomic aussi cohérent qu’abouti.
Place à Rameau maintenant en conclusion de la saison de l’OnR avec la reprise de la délectable Platée de Mariame Clément, que l’on retrouve sous la direction de Christophe Rousset du 13 au 21 juin.
Alain Cochard
Adams : Doctor Atomic – Strasbourg, Opéra, 9 mai 2014
(1) www.concertclassic.com/article/le-coq-dor-par-les-percussions-claviers-de-lyon-feerie-pour-pouchkine-compte-rendu
(2) Créateur du rôle en 2005, Gerald Finley a pris part également à la production de Penny Woolcock au Met en 2008 (disponible en DVD / Sony)
Photos © Alain Kaiser
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