Journal
DVD : Entertainment
Le spectacle est fantastique, mais c’est un peu Brigadoon ! McVicar entraîne l’expédition d’Egypte de Jules César au temps de l’occupation britannique, et lit tout l’opéra du coté de la vis comica :interprétation limitée, frauduleuse même, mais qui autorise un show perpétuel souvent ébouriffant. Dans ce registre (mais on la sent capable d’en prendre à chaque instant le contre-pied) la Cléopâtre de Danielle de Nisse atteint à la perfection, autant par sa plastique et ses jeux de scène désopilants que par la pure beauté de sa voix aussi virtuose qu’expressive. Pour la vaillance Sarah Connolly en remontrerait à toute les contreténors qui ont abordé César, à tous sauf un, Jeffrey Gall, dont les rossignolades de Se in fiorito ameno prato montraient d’autres ailes que celles, alourdies, de la mezzo.
On aimera moyennement l’Achille rogue de Christopher Maltman. Inutile de dire que les personnages tragiques sont sacrifiés, mais inégalement : McVicar ne laisse aucune chance à Cornelia (campée terne par une Patricia Bardon parfois fâchée avec la justesse, toujours musicienne cependant) mais rédime Sesto, en lui faisant endosser les culottes de Chérubin. Une formidable Angelika Kirschlager tente et réussit le paris d’un adolescent ivre de vengeance. Simplement saisissant. On tressera aussi des lauriers à Christophe Dumaux, Ptolémée comique que l’on peine à croire dangereux, mais qui éblouit par sa virtuosité et son incarnation follasse (ah le grand moment lorsqu’il endosse la robe très mille et une nuits de sa sœur !).
Et il faudra surveiller Rachid Ben Adbesalam, joli « contreténorino » qui réussit en finesse le plus attachant Nireno qu’on ait jamais connu. William Christie fait briller de tous ses feux un Orchestre de l’Age des Lumières de très grande venue. L’option de McVicar le soulage de tenter l’émotion, la folie, les coups de théâtre dramatique qui abondent durant ces quatre heures de musique, et du coup il atteint dans cette optique à une performance rayonnante mais un peu niaise. Un documentaire, assez saoulant et convenu, sur Danielle de Nisse, un autre plus fouillé, sur la genèse du spectacle complètent ce fort album de trois DVD qui bénéficie d’une édition remarquable, la loi du genre chez Opus Arte. En voyant le rideau tomber, on ne pouvait pourtant s’empêcher de repenser à la production de Peter Sellars, qui lui aussi sollicitait la veine comique, mais pas seulement. Fut-elle seulement captée ?
Jean-Charles Hoffelé
Georg Frideric Haendel : Giulio Cesare/ Opus Arte OA 0950 D
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