Le compositeur Nicolas Frize (né en 1950) s’est spécialisé ces dernières années dans une forme d’intervention musicale qui associe des participants amateurs, dont de nombreux élèves, au cours d’une longue préparation en amont. Une expérience à la fois sociologique et sociale. C’est ainsi que son dernier spectacle (?), intitulé Elle s’écoule, est le fruit d’un travail mené pendant deux ans dans le département de la Seine-Saint-Denis. À la Maison des Sciences de l’Homme (déjà tout un programme !), la foule se presse pour cette création alternant huit séquences mises en espace de formations instrumentales et vocales diverses, dans un parcours à travers différents lieux de ce neuf bâtiment tout de verre et de métal.
 
La musique fraîche et gentille, composée spécialement par Frize, se veut immédiatement accessible, ludique, facile et essentiellement consonante. Se succèdent : une séance d’accueil par deux pianos, deux violons et une guitare électrique ; une page pour guitare, violoncelle, percussion et traitement numérique ; un trio vocal accompagné au kora (sorte de luth africain) ; un trio de harpe, harpe troubadour et viole de gambe ; une forme de cantate pour basse, basson et son préenregistré ; un duo de piano et objets frappés ; un petit mélodrame pour récitante, flûtes et saz (luth d’origine iranienne cette fois) ; et, pour finir en beauté, un grand chœur accompagné à la guitare électrique et de sons enregistrés, sous la direction de Nicolas Fehrenbach. À la charge d’interprètes de tous âges et largement d’enfants venus des collèges de cette banlieue dite défavorisée, pour un travail collectif hors des habitudes et où ne manque pas l’enthousiasme. La musique comme un geste citoyen, dans une réalisation des plus sympathiques.
 
Pierre-René Serna

Nicolas Frize : Elle s’écoule – Saint-Denis, Maison des Sciences de l’Homme, 10 juin 2018 // www.nicolasfrize.com
 
Photo © Bernard Baudin