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Épisode de la vie d’un artiste au Festival Berlioz - Artistes au sommet - Compte-rendu
John Eliot Gardiner (photo) revient au Festival Berlioz, après une première apparition remarquée lors de l’édition précédente (1).
Mais cette fois à la tête de son Orchestre révolutionnaire et romantique, et dans un programme tout Berlioz. Puisqu’il s’agit d’Épisode de la vie d’un artiste, bien rarement donné en tant que tel, diptyque qui réunit la Symphonie fantastique et sa suite du monodrame lyrique de Lélio ou le Retour à la vie.
On sait que ce second volet poursuit le programme de la Fantastique (seul et unique programme dans toute l’œuvre de Berlioz), mais sur un autre registre : celui d’un théâtre de concert, d’un mélodrame comme l’ont illustré d’autres compositeurs, où un texte déclamé par un récitant s’alterne de pages musicales. Il s’étoffe, en outre, d’un chœur, d’un ténor et d’un baryton, ainsi que d’un piano.
La dimension symphonique prend donc une autre projection. Il importe alors de réunir les intervenants idoines. Ce qui, avec Gardiner comme maître d’œuvre, ne peut que s’accomplir, on s’en douterait. Mais ici, au-delà même de toute attente. Dans l’auditorium de structures métalliques placé dans la cour du château de La Côte-Saint-André, la Symphonie fantastique vibre, tellurique, comme surgie des profondeurs. Et comme neuve. Les instruments d’époque ou copies (y compris les cloches, fondues en 2013 et joyaux du festival), leur disposition sur le plateau voire hors du plateau, le jeu des attaques et des tempos, livrent un rendu sonore acerbe, un relief inédit dans une clarté lumineuse des différents plans polyphoniques. « On croirait du Stravinsky », me confie un ami à l’entracte. Ce qui serait une forme d’hommage, à l’interprétation comme à l’œuvre, restituée ainsi qu’au premier jour, dans son intemporalité. On n’attendait pas moins du chef britannique et de son orchestre, mais on n’en reste pas moins saisi et frappé par une telle alacrité conjuguée d’une telle musicalité. Chapeau bas Messieurs !
Michael Spyres © DR
Ces mêmes vertus se poursuivent et se confirment, bien entendu (et très bien entendu), côté orchestre pour les diverses autant que belles pages musicales de la seconde partie. Mais survient le chœur, celui du National Youth Choir of Scotland, d’une vigueur (la « Chanson de Brigands ») et d’une subtilité (« Chœur d’ombres » et « Fantaisie sur la Tempête »), d’une malléabilité pour tout dire, d’exception. Dans ses deux mélodies, Michael Spyres distille pour sa part, une technique di grazia que peu savent comme lui dispenser, tout en maintenant une projection ardente. Décidément, un ténor idéal pour Berlioz. Laurent Naouri plante un Capitaine de Brigands, pétulant et pétaradant comme il se doit. Et à Denis Podalydès revient d’incarner Lélio, personnage dont il s’empare avec le doigté et le ton de juste diseur que l’on sait de cet homme de théâtre éprouvé. Une réunion de grands artistes à leur sommet.
Pierre-René Serna
1. Voir : http://www.concertclassic.com/article/gardiner-et-le-london-symphony-orchestra-au-festival-berlioz-mariage-parfait-compte-rendu
La Côte-Saint-André, Festival Berlioz, 23 août 2015
Photo Sir John Eliot Gardiner © Delphine Warin / Festival Berlioz
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