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Ermonela Jaho et Charles Castronovo en récital au Théâtre des Champs-Elysées – Duo embrasé - Compte-rendu

 
 

Dépassé le concert, ringard les airs et les duos entrecoupés d'ouvertures et d'intermèdes orchestraux ? Certainement pas, surtout quand les artistes croient en cet exercice et sont heureux de s'adresser au public sous cette forme. Accompagnés avec chaleur par Marco Zambelli à la tête de l’Orchestre National d'Ile-de-France, Ermonela Jaho (photo) et Charles Castronovo ont su enchanter leur auditoire dans un programme consacré d'abord à Massenet, puis au répertoire vériste.
 

Charles Castronovo © www.charlescastronovo.com

Encore jeunes, intrépides et enthousiastes, chacun d'eux a révélé les différentes facettes de sa personnalité, avant de brûler les planches dans un duo de Saint-Sulpice (Manon) admirable de trouble sensualité. Le ténor avait auparavant ouvert le bal avec une rareté, l'air de Jean « Ah qu'il est loin mon pays » extrait de Sapho, chanté avec une belle assurance dans un français parfait, suivi par l'air de Fanny « Pendant un an je fus ta femme » musicalement en place et efficacement nuancé par la soprano, mais souffrant d'une diction confuse. Totalement remis après s'être retiré d'Olympie de Spontini présenté au TCE le 3 juin (1), Charles Castronovo s'est ensuite attaqué à Werther avec un Lied d'Ossian vigoureux et blessé, chanté avec une telle exaltation que l'âme suicidaire du poète a fait vibrer le public, avant que celui-ci ne fonde devant les charmes ensorcelants prodigués par Ermonela Jaho dans l'air du miroir de Thaïs, exécuté avec panache, contre-ré à l'appui.
 
Sûre de son ascendant, la soprano albanaise a confirmé en seconde partie la versatilité de son talent et la richesse de ses moyens, d'abord avec l'air d'entrée d'Adriana Lecouvreur ourlé avec maîtrise jusque dans d'impalpables piani, changeant ensuite de registre avec un impressionnant « Sola, perduta, abbandonata » de Manon Lescaut. Pour ne pas être en reste, Charles Castronovo avait pour sa part choisi l'air de Fritz « Ed anche Beppe amo » de Mascagni, avant d'aborder le célèbre lamento de Federico issu de L'Arlesiana de Cilea, dont la ligne vocale immaculée et la beauté latine du timbre ont réuni tous les suffrages. Avant quelques bis bien choisis, « Core n'grato » pour lui, « Il bel sogno di Doretta » pour elle, ce très beau couple d'opéra s'était lancé dans la longue scène finale de La Rondine de Puccini, où Magda et Ruggero se quittent non sans douleur et regret, avant de revenir une dernière fois avec « O soave fanciulla » immanquable duo de La Bohème, pour conclure sur une note heureuse et pleine de promesses.
 
François Lesueur

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(1) Lire le CR : www.concertclassic.com/article/olympie-de-concert-au-theatre-des-champs-elysees-reveil-triomphal-de-charmes-endormis-compte
 
Paris, Théâtre des Champs-Elysées, 7 juin 2016 / Prochain concert des Grandes Voix, le 27 juin, avec Sonya Yoncheva et Karine Deshayes

Photo Ermonela Jaho © DR

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