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The Great Gatsby par le Ballet de Kiev aux Folies Bergère – Accrocheur et supertonique – compte rendu
Une soirée sexy et des danseurs merveilleux, en un lieu dont le kitsch drôlissime est une sorte de bol d’oxygène pour qui fréquente les austères murailles de la Philharmonie de Paris ou de l’Opéra Bastille. Un lieu surtout idéalement adapté au menu proposé : du clinquant, du glamour, du provoquant, pas de paillettes mais de la gambette et du muscle, le tout enlevé vertigineusement par un groupe de danseurs formés aux plus dures règles de l’académisme : pour ce Great Gatsby venu d’Ukraine ( !!!) deux producteurs nullement spécialisés dans le ballet, Alexandre et Alexei Polevoy ont eu l’idée de monter un spectacle autour du prestigieux danseur Denis Matvienko, riche d’une superbe carrière sous tous les horizons et notamment à Tokyo, où les japonais raffolent de son style viril.
Matvienko, devenu vedette itinérante, comme nombre de ses compatriotes, avait depuis toujours envie de camper cet anti-héros à la fois dépravé et touchant qu’est Gatsby, le personnage mythique créé par Francis Scott Fitzgerald. Le danseur rassembla donc autour de lui quelques pépites de l’Opéra de Kiev, d’autres venues d’Odessa et de Saint-Pétersbourg, une adaptation fut faite du roman, une chorégraphie bâtie, une musique composée, et vogue la galère de par le monde, où depuis trois ans , le ballet remporte partout un très vif succès.
La pose parisienne fut donc réjouissante, et surtout grâce à d’exceptionnels interprètes, allurés, chics, les filles développant des jambes sublimes et des écarts grandioses , outre une élégance gouailleuse pour Ekaterina Kalchenko, dont une Zizi Jeanmaire n’aurait pas désavoué l’esprit canaille, tandis qu’une ballerine infiniment romantique, Olga Grishenkova, incarnait une Daisy au délicat physique de poupée mais aux jambes de pur sang.
Pour les autres, on doit avant tout, on le confesse, vanter l’éblouissante performance de l’élément américain de la troupe, le superbe Clifford Williams, digne d’un Valentin le désossé, musculeux sans excès avec une souplesse de geste que les danseurs classiques - ce qu’il est- déploient rarement. Matvienko est lui, prenant et puissant, avec un masque torturé qui demeure son plus fort atout, même si un expressionnisme un peu poussé le conduit vers un semblant de caricature. Il faut dire que le personnage, complexe, s’y prête fortement. On se souvient des excès du prodigieux Leonardo Di Caprio dans le film de Baz Luhrmann.
Pour le reste, on a applaudi à la chorégraphie du chorégraphe américain Dwight Rhoden qui déroule souplement, en des tableaux étourdissants de dynamisme et de virtuosité, les phases compliquées de cette fresque décadente, même si les péripéties n’en sont pas toujours très claires. On a moins aimé en revanche, la musique soap de Konstantin Meladze et Yuri Shepeta, qui se répand sans fin pour gonfler l’action au lieu de simplement la soutenir. Elle aurait gagné à être plus sèche et plus jazzy, pour donner davantage de piquant au style de danse choisi, lequel emprunte d’ailleurs beaucoup à grands noms de la danse américain, comme Alvin Ailey.
Volutes de fumée, rubans brillants lancés dans la salle, dont les fauteuils fatigués ne demandent que cela, grands écarts et flingues, alcool et belles bagnoles esquissés sur la scène, le public est ravi ! Et quand retombe le rideau froufrou rose, il se dit qu’il n’a pas été floué, tant la qualité de la danse est ici majeure. Un peu de rose bonbon dans la grisaille contemporaine !
Jacqueline Thuilleux
The Great Gatsby (chor. Dwight Rhoden) - Paris, Folies Bergère, 17 octobre ; prochaine représentation le 18 octobre 2017/ www.foliesbergere.com
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