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Il Barbiere di Siviglia à l’Opéra Bastille – Un Barbier de comédie italienne – Compte-rendu
Ce Barbier produit au Grand Théâtre de Genève en 2010 et repris à l’Opéra Bastille nous transporte dans une Espagne contemporaine qui se révèle en fait plus napolitaine que sévillane. L’agitation, le tohu-bohu sont réglés au cordeau par la mise en scène dynamique du vénitien Damiano Michieletto dans un décor mobile de Paolo Fantin alternant la façade imposante d’un immeuble populaire et son côté cour avec escaliers en colimaçon où se déplacent les personnages dans un chassé-croisé incessant, très spectaculaire. Au sein de cet univers de comédie italienne à la Ettore Scola, chacun vaque à ses occupations simultanément - on songe à « La Vie mode d’emploi » de Perec. Un tel dispositif, très contraignant pour les chanteurs qui doivent faire preuve de qualités athlétiques, permet de varier les climats, d’appuyer les gags au gré d’une action virtuose.
Sans démériter, la distribution ne fait pas découvrir de véritables individualités. Le Figaro de Dalibor Jenis, en demi-teinte, peine quelque peu dans les acrobaties vocales mais possède de l’abattage et de la vivacité théâtrale (en particulier dans la sérénade où il s’accompagne lui-même à la guitare). Empêtrée dans un costume qui ne lui sied guère et une perruque rousse, Karine Deshayes joue plus à la Rosine bon enfant, bien en chair, qu’à l’adolescente piquante et coquine. Son timbre clair délivre des moments de pure beauté par un style et une musicalité jamais pris en défaut en dépit d’un manque de graves. Le Bartolo de Carlo Lepore se distingue par un chant d’une belle couleur, tandis que le Basilio de Orlin Anastassov, gêné dans les récitatifs par un italien approximatif, n’emporte guère l’adhésion (Air de la calomnie). L’Almaviva de René Barbera tient son rang avec autorité et une souple vocalité. Excellents seconds rôles, en particulier le Fiorello de belle prestance de Tiago Matos ou la Berta très sexy de Cornelia Oncioiu – deux membres de l’Atelier lyrique de l’Opéra de Paris.
Dans la fosse, Carlo Montanaro s’emploie honnêtement à défendre l’ouvrage avec un sens des nuances et un solide métier qui ne déclenchent pas une folle volubilité rossinienne (hormis dans le final de l’acte I). L’Orchestre National de l’Opéra, sous cette baguette attentive et contrôlée, suit fidèlement les intentions du chef avec la qualité instrumentale qu’on lui connaît. Succès public indéniable pour ce nouveau spectacle d’ouverture de la saison de l’Opéra de Paris.
Michel Le Naour
Rossini : Le Barbier de Séville – Paris, Opéra Bastille, 23 septembre, prochaines représentations les 25, 28 et 29 septembre, 1er, 4, 14, 15, 20, 23, 30 octobre, 3 novembre 2014. http://www.concertclassic.com/concert/barbier-de-seville-de-rossini-bast...
Photo © Bernard Coutant / Opéra national de Paris
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