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Le Disque de la Semaine – Les Etudes de Debussy par Philippe Bianconi (La Dolce Volta) : suprême aboutissement – Compte-rendu
Chaque chose en son temps. Huit ans après une version majeure des Préludes de Debussy(1), Philippe Bianconi est revenu à cet auteur en studio, en janvier dernier, pour immortaliser son interprétation de ce qu’il désigne comme le « suprême chef-d’œuvre » de Claude de France : les Etudes (2). Les disques pleuvent en cet automne ; celui-ci est de ceux sur lesquels on s’arrête longuement, que l’on prend le temps de savourer et auxquels, d’emblée, on sait que l’on reviendra souvent. Suprême aboutissement d’une approche qui, par-delà la totale maîtrise technique de ces pages redoutables, sait en dévoiler les richesses, d’une manière aussi singulière que convaincante.
Pour les "cinq doigts" - d'après Monsieur Czerny (ext.)
Pour les sixtes (ext.)
Pour les arpèges composés (ext.)
« Je me persuade de plus en plus que la musique n’est pas, par son essence, une chose qui puisse se couler dans une forme rigoureuse et traditionnelle, écrivait Debussy à Jacques Durand en 1907. Elle est de couleurs et de temps rythmés. » Modernes, radicales les tardives Etudes ? Sans conteste mais, loin de marquer une quelconque rupture avec ce qui a précédé, elles ne sont que l’expression ultime – et exacerbée il est vrai – de la démarche d’un créateur étranger à tout système. Prêtez donc un instant l’oreille aux Cinq doigts qui ouvrent le Livre I et vous vous trouverez, illico, comme aimanté et embarqué dans une interprétation fascinante par la liberté du geste, la subtilité des coloris et une formidable densité poétique. Plutôt que d’aiguiser les Etudes comme des rasoirs ou de les intellectualiser au nom de la modernité, Bianconi préfère en sonder les mystères, en fouiller les arrière-plans (écoutez ces Sixtes, ces Sonorités opposées, ces Arpèges composés, la partie centrale des Accords), pour approcher la part la plus secrète, la plus troublante du génie debussyste.
Pour les accords (ext.)
Programme idéalement construit, l’Elégie (pièce méconnue, exactement contemporaine des Etudes), nue, triste, désespérément résignée, offrant une bouleversante transition vers la Suite du Martyre de saint Sébastien (réalisée par André Caplet), ouvrage trop négligé des pianistes et dont Bianconi explore avec tact les climats envoûtants (admirable Chambre magique !), avant de conclure par Les Soirs illuminés par l’ardeur du charbon (1917), prégnant et nostalgique point d’orgue d’un disque magistral.
Le Martyre de saint Sébastien - La Chambre magique (ext.)
Debussy fera partie du programme, complété par des pages de Chopin et Beethoven, que le pianiste donne dans le cadre du Festival Piano en Valois d’Angoulême ce 8 octobre. Le 31 octobre, c’est à Paris, aux Bouffes du Nord dans le cadre du 3e Festival La Dolce Volta (3), que l’on retrouvera Bianconi, en musique de chambre avec Gary Hoffman et en solo (dans les Etudes de Debussy). On ne sera pas moins curieux, le 12 novembre à Cannes, d’un concert réunissant le fameux 21e Concerto de Mozart et la trop rare – et pourtant géniale ! – Aubade de Poulenc, sous la baguette de Benjamin Lévy à la tête de l’Orchestre Cannes Provence Alpes Côte d’Azur.
Alain Cochard
(1) La Dolce Volta / LDV 07
(2)Debussy : Etudes, Elégie, Suite du Martyre de saint Sébastien (transc. André Caplet), Les Soirs illuminés par l’ardeur du charbon // La Dolce Volta LDV 84
(3) www.bouffesdunord.com/fr/la-saison/festival-la-dolce-volta
Calendrier des concerts de Philippe Bianconi : www.philippebianconi.com/concerts/
Photo © William Beaucardet
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