Journal
Le Disque de la Semaine – Sélim Mazari joue Beethoven (Mirare)
Variations en ut mineur WoO 80 - Var. XXVII
Mazari n’a pas pris prétexte de ses précoces succès (dont une Révélation ADAMI dès 2012) pour presser les choses. Après le Conservatoire de Paris, il est allé étudier à Londres auprès de Dmitri Alexeev, avant de mettre le cap sur Vienne pour recueillir l’enseignement d’Avo Kouyoumdjian (un ancien élève de Dieter Weber et Stanislav Neuhaus). Il avait participé en 2011 à un disque de musique de chambre (avec Juliette Hurel et Joséphine Olech) (1), mais aura attendu 2020 pour livrer son premier enregistrement en solo : un récital Beethoven (2), longuement mûri en concert, sur la scène de la salle Molière à Lyon entre autres, lieu qui, grâce à la saison Piano à Lyon de Jérôme Chabannes, fait désormais référence en France en matière de clavier. En juin 2019, cette belle salle Molière a d'ailleurs servi de studio pour la captation du programme de variations que l’on salue aujourd’hui.
Variations Eroica op. 35 - Finale alla Fuga
Au cœur de celui-ci, les Variations Eroica, cycle génial et sous-estimé – de 1802 seulement, mais ô combien riche de prémices ... –, victime de l'ombre que lui font les fameuses Diabelli. Les interprètes s’aventurent rarement dans l’Opus 35, d’une rare densité et d’une difficulté redoutable ; ceci expliquant d’ailleurs beaucoup cela ... Beau défi que Sélim Mazari ose et relève avec une maturité étonnante, sachant à la fois empoigner l’ouvrage dans sa totalité et en sonder les humeurs changeantes avec une stupéfiante mobilité du regard et du jeu.
Au sein d’un récital impeccablement construit et équilibré, la réussite n’en devient que plus évidente. Le disque s’ouvre par les Variations en ut mineur WoO 80 : l'énergie et la kaléidoscopique ivresse que Mazari leur imprime procurent le sentiment d’entrer dans le laboratoire de recherche que le thème et variations fut pour Beethoven, à l’instar de la sonate. Suivent les Variations sur Das Waldmächen WoO 71, dont le caractère plus délicat, traduit ici avec une élégance et un style admirables, contraste avec l’Opus 35. Après celui-ci, les Variations op. 34, exactement contemporaines, montrent des trouvailles et audaces que l’interprète met en valeur avec autant de sensibilité que de jubilation intellectuelle. Le cœur et l’esprit : un vrai beethovénien est à l’œuvre ici.
Variations sur Das Waldmädchen – Variation VII
Variations sur un thème original op. 34 – Var. VI
L’année Beethoven commence bien côté piano et l’on s’impatiente de retrouver Sélim Mazari en concert. Dès le 16 janvier, il est de retour à la Fondation Vuitton (qui l'avait déjà reçu en juin 2018), avant La Folle Nuit à Grenoble (le 18) et la Société des Arts de Genève (le 23). Toute beethovénienne cette année, la Folle Journée de Nantes l’attend les 1er et 2 février, puis les Sommets Musicaux de Gstaad (le 6), la saison Sinfonia à Périgueux (le 14) et Piano à Lyon (le 19). Le 22 mars, il prendra part à l’intégrale des sonates de Beethoven à Radio France, parrainée par François-Frédéric Guy et partagée entre huit jeunes pianistes. (3) Et 2020 ne fait que commencer ...
Les occasions ne vont pas manquer pour suivre l’envol de Sélim Mazari, d’un très grand musicien ; ne les ratez pas !
Alain Cochard
(2) 1 CD Mirare MIR 488
(3) www.maisondelaradio.fr/integrale-des-sonates-de-beethoven
Calendrier des concerts de Sélim Mazari : www.selimmazari.com/concerts_list/
Photo © Caroline Doutre
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