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Le Requiem de Brahms par l’Orchestre de Paris et Paavo Järvi - Impressionnant - Compte-rendu

Un concert « grand, noble et généreux », car axé sur une sorte de gigantisme qui mariait la spiritualité tonitruante de Messiaen à l’orée de son talent avec Le Tombeau resplendissant (1931) - une première pour l’Orchestre de Paris  -, à la grandeur bouleversante du Requiem de Brahms, sans lequel un orchestre doté d'aussi magnifiques chœurs que ceux de l’Orchestre de Paris ne saurait avoir rempli sa mission. Quelques repères se rappellent à cette occasion : la très belle interprétation qu’en donna Kurt Masur à Saint-Denis en 2004, avec l’Orchestre National de France, ou la subtile lecture au disque de Simon Rattle avec les Berliner Philharmoniker. Il disait percevoir Ein deutsches Requiem  comme « un retour aux sources d’un compositeur qui fut aussi un musicologue ». Des échos monteverdiens résonnaient dans ce monument à la germanité luthérienne.
 

Lionel Sow / Photo © DR
 
Telle n’est point la vision de Paavo Järvi, qui donne là toute sa mesure de vainqueur. Son Requiem est mené avec une tension, un stress, qui lui confèrent une ossature puissante et dure, et le taillent comme un monolithe. La montée des chœurs, admirablement préparés par Lionel Sow, est menée avec une énergie implacable, et l’ensemble répond à la battue du chef comme une troupe en campagne. Il les électrise, les guide en une marche lourde et douloureuse vers l’issue finale, dont on ne sait si elle promet vraiment le repos éternel à l’humanité blessée. Impossible de résister à cette pression angoissante.
 

Matthias Goerne / Photo © DR
 
La tendresse, la douceur, il y en a au centuple dans la magnifique intervention de Matthias Goerne, aussi tourmenté, aussi mobile dans son chant que le chef est volontaire. Une sorte de combat passionnant. Fine et veloutée aussi la voix de la soprano norvégienne Marita Solberg, à laquelle le chef ne permet guère de trop s’alanguir. On l’a compris, l’optique choisie, et réussie, était celle du grandiose. Mais le grandiose a ses faiblesses.
 
Jacqueline Thuilleux
 
Paris - Salle Pleyel, le 22 mai 2014.

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