En janvier 2016 Pierre Henry (1927-2017) donnait son dernier concert à la Cité de la musique ; près de quatre ans plus tard le Musée de la musique inaugure le « Studio Pierre Henry », nouvelle salle permanente d’un établissement qui, partant, inclut désormais un maillon essentiel de l’histoire de la musique du XXe siècle dont l’influence aura largement dépassé le domaine de la musique savante pour s’étendre à celles dites « actuelles » – l’admiration de nombre d’artistes de la scène électro pour Pierre Henry n’est plus à dire.

Pierre Henry en concert dans sa maison de la rue de Toul en 2008 :
www.concertclassic.com/video/pierre-henry-en-concert-dans-sa-maison-2008

Grâce à la donation du studio Son/Ré (que Pierre Henry avait installé en 1982 dans sa maison du 32 rue de Toul - 75012) au Musée, ce dernier a pu imaginer un espace de 120 m² où l’on retrouve l’essentiel des appareils avec lesquels l’artiste a travaillé : les fameux magnétophones à bandes Telefunken M15A, la table de mixage analogique EMT à 30 voix, le magnétophone Mitsubishi MX80, etc.
 

Une porte et un soupir (1962), objet d’un ballet chorégraphié par Maurice Béjart, Psyché Rock, l’un des tableaux de la fameuse Messe pour le temps présent (1967), elle aussi magnifiée par Béjart, et enfin le Beethoven Remix que Pierre Henry tira en 1998 de sa Dixième Symphonie de Beethoven (1979), fascinant exercice d’appropriation de fragments des 9 Symphonies du compositeur allemand, constituent les trois pôles du « Studio Pierre Henry » installé au Musée de la musique.
 

Un lieu que l’on « visite » certes, mais qui offre aussi la possibilité, grâce à des postes d’expérimentation tactile, d’appréhender physiquement le processeur créateur de Pierre Henry et de comprendre la démarche de celui qui affirmait : « Mes premiers souvenirs de musique sont l’orage, le vent et le train ».
A l’écoute de la respiration du monde, aux « sons » dans leur infinie variété – il détestait le mot « bruit » ! –, Pierre Henry a montré une singulière attention au timbre. Le Musée de la musique en a profité pour élaborer une « nébuleuse », grand tableau synoptique offrant autour de la notion de timbre, un filtre de lecture de la création musicale au XXe siècle, de la « mélodie de timbre » de Schoenberg à l’électro. Excellente idée !

La découverte du Studio constituera une étape préalable idéale pour ceux qui se rendront à l’hommage à Pierre Henry que la Philharmonie de Paris propose du 20 au 24 novembre prochains. « Week-end Pierre Henry » ? La formule est quelque peu excessive s’agissant d’une programmation qui ne comporte que deux soirées, mais elles feront à coup sûr le bonheur du public.

Mercredi 20 novembre, la Messe pour le temps présent sera donnée dans la chorégraphie de Béjart revue par Hervé Robbe (avec la participation des étudiants du Centre national de danse contemporaine - Angers), suivie d’une version remixée. En prélude, on découvrira (en première audition parisienne) le Carnet de Venise, ouvrage empli d’échos de Monteverdi, créé en 2003 lors de la Folle Journée de Nantes, dont il faut signaler qu’un enregistrement sortira d’ici quelques semaines dans la belle collection que le Musée de la musique a lancée avec Harmonia Mundi.

Second temps fort de l’hommage, la Dixième Symphonie de Beethoven (23 nov.) sera donnée –  en création s’agissant de cette version symphonique – par les forces réunies du Philharmonique de Radio France, de l’Orchestre du Conservatoire, du Chœur de Radio France et du Jeune Chœur de Paris, sous la triple direction de Pascal Rophé, Bruno Mantovani et Marzena Diakun.
Enfin, comme il est de coutume à la Philharmonie, le jeune public n'a pas été oublié : un spectacle « O(H)M, triturateur sonique » (24 nov., 11h et 15h) lui permettra de découvrir les techniques de composition de Pierre Henry.

Alain Cochard

« Week-end Pierre Henry »
20-24 novembre 2019-11-16
Paris – Philharmonie
philharmoniedeparis.fr/fr/programmation/les-week-ends-thematiques/week-end-pierre-henry

Photo © B. Mandico et H. Imbault