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Le Trouvère à l’Opéra Bastille – Quand fidélité rime avec longévité – Compte-rendu
Si le poids des années pèse nettement sur les cordes du ténor mexicain, dont l'instrument endommagé n'a plus toutes les ressources pour assumer la vaillance du rôle-titre, il n'en va pas de même pour la soprano. Il est d'ailleurs étonnant de constater combien sa Leonora est supérieure à celle de 2003. A cette époque la voix disparate cherchait l'homogénéité, luttait pour unir les registres et ne parvenait pas toujours à masquer certaine raideur d'émission. Sa manière de chanter Verdi n'était pas indigne, mais elle trahissait l'effort sans que la cantatrice ne parvienne à se libérer. Le travail accompli sur ce matériau vocal imposant, mais rebelle, est admirable ; ligne mélodique contrôlée, phrasé altier, souffle inépuisable, aigu flottant et amplitude constituent les linéaments d'un chant de grande école, qui fait de Sondra Radvanovsky une verdienne d'exception.
Après ses mémorables prestations in loco dans Aida et Ballo in maschera, cette nouvelle performance donne envie de l'entendre enfin dans La forza del destino, ouvrage qu'elle abordera peut être après cette Luisa Miller prévue la saison prochaine à Barcelone notamment. Face à cette Leonora voluptueuse, Marcelo Alvarez montre d'évidents signes d'usure, tension et crispation récurrentes venant polluer une émission jadis plus aisée.
Zeljko Lučić (Il Conte di Luna) & Anita Rachvelishvili (Azucena) © Julien Benhamou - OnP
Sur le terrain de la stricte beauté vocale et de la sûreté technique, Zeljko Lučić (également présent en 2003, et alors inconnu) ne peut rivaliser avec Ludovic Tézier, Conte di Luna absolument parfait, mais son interprétation est loin d'être terne. Succédant à Ekaterina Semenchuk, impressionnante Azucena la saison dernière face à Netrebko et à Alvarez, Anita Rachvelishvili compose une gitane de caractère dont les larges moyens ne cachent pas la recherche de nuances. Comprimari de qualité, Mika Kares (Ferrando) et Elodie Hache (Inès), chœurs vigoureux et orchestre dirigé avec sobriété par Maurizio Benini – qui était en fosse il y a quinze ans ! –, donnent tout son sens à cette reprise qui verra également le retour de Roberto Alagna (les 25 et 28 juin) en Manrico comme en 2003... Décidément, la fidélité est une constante à l’Opéra Bastille.
François Lesueur
Verdi : Le Trouvère – Paris, Opéra Bastille, 20 juin ; prochaines représentations 25, 27, 28, 30 juin, 4, 5, 7, 10, 11, 13 et 14 juillet 2018 // www.concertclassic.com/concert/le-trouvere
Photo © Julien Benhamou - OnP
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