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Les Maîtres Chanteurs à l’Opéra Bastille – Pur enchantement – Compte-rendu
Les Maîtres Chanteurs sont présentés pour la première fois à l’Opéra Bastille en version scénique dans la production du Norvégien Stefan Herheim (créée au Festival de Salzbourg en 2013). Sa vision s’écarte d’une tradition célébrant à la fois le passé médiéval de Nuremberg et les présupposés politiques ou idéologiques de l’Allemagne. Il s’agit plutôt ici d’un rêve de Wagner/Sachs, personnage faustien dédoublé sorti des contes de Grimm, dans des décors de Heike Scheele où le fantastique côtoie le style Biedermeier. La maison de poupée jouxte l’atelier, les marionnettes géantes un monde lilliputien dans un bric-à-brac savamment organisé. La direction d’acteur, impressionnante de virtuosité, charge un peu la barque parfois mais illustre avec bonheur un univers imaginaire, pourtant imprégné de l’époque de Wagner (irruption d’un train sur le plateau avant le concours de chant, sorte de clin d’œil à la Révolution industrielle).
© Vincent Pontet - Opéra national de Paris
Wagnérien dans l’âme, Philippe Jordan mène ses troupes de l’Orchestre de l’Opéra de Paris avec une élégance proche de la musique de chambre : chaque pupitre se distingue, servi par une direction à la fois narrative et claire dont l’intensité ne faiblit jamais. Les chœurs, si importants dans l’œuvre, montrent également une parfaite cohésion grâce à une préparation méthodique de José Luis Basso. Le plateau vocal témoigne d'une grande homogénéité. Le Hans Sachs de Gerald Finley, belle ligne de chant et présence chaleureuse, convainc par son humanité malgré une fatigue compréhensible au dernier acte. Etonnant par son jeu d’acteur, virevoltant, loin de l’image habituelle d’un Beckmesser niais et sournois, Bo Skovhus réalise une exceptionnelle performance théâtrale. Physique idéal, le Walther de Brandon Jovanovich séduit plus par son allure chevaleresque que par son chant assez banal, en revanche Julia Kleiter, fine et subtile Eva, possède un art consommé de la composition, à l’instar de Toby Spence en David juvénile et touchant, ou de Wiebke Lehmkuhl, Magdalene pleine de fraîcheur. Les Maîtres forment un compagnonnage pittoresque et typé aux costumes colorés d'où se détache le Pogner noble de Günther Groissböck. Il faut aussi citer le veilleur de nuit d’Andreas Bauer qui, dabns ses deux brèves apparitions, crée un moment de pure féerie, à l’image du spectacle, reçu avec enthousiasme par le public.
Michel Le Naour
Wagner : Les Maîtres-Chanteurs de Nuremberg - Paris, Opéra Bastille, 1er mars, prochaines représentations, les 5, 9, 13, 21, 25 et 28 mars 2016 / www.concertclassic.com/concert/les-maitres-chanteurs-de-wagner
Photo © Vincent Pontet / Opéra national de Paris
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