Il y a deux décennies, Anne-Marie Réby lançait le festival Solistes aux Serres d’Auteuil. Ce lieu ayant connu le sort que l’on sait, la manifestation a pris la direction du bois de Boulogne il y a une petite dizaine d’années, rebaptisée « Solistes à Bagatelle », tout en restant fidèle au piano et à des récitals en une partie dominés par le grand répertoire mais faisant systématiquement place à une pièce contemporaine.
Concentrée sur la toute fin août et la première quinzaine de septembre, la programmation des Solistes, depuis l’installation à l’Orangerie (1), fait figure de pendant pianistique de rentrée au Festival Chopin. Du fait du contexte sanitaire, celui-ci n’a hélas pu se tenir l’an dernier (les Solistes avaient aussi dû annuler), ni cette année hélas : l’édition des 20 ans est d’autant plus attendue qu’elle marque le retour du piano à l’Orangerie après une longue absence.
 
Depuis le commencement, Les Solistes ont contribué à l’émergence d’interprètes à l’orée de la carrière : c’est à ceux qui ont été présents dans les années 2000 à l’affiche du festival qu’Anne-Marie Réby a pensé cette fois en invitant douze d’entre eux (selon un rythme immuable : deux récitals le samedi, deux le dimanche, à 16h et 18h) : Claire Désert et Cédric Tiberghien (28/08), Shani Diluka, et Vanessa Wagner (29/08), Béatrice Berrut et Philippe Bianconi (4/09), Eric Le Sage et Jean-Efflam Bavouzet (5/09), David Kadouch et Claire-Marie Le Guay (11/09), Geoffroy Couteau et François-Frédéric Guy (12/09).
 

Régis Campo dont Philippe Bianconi donnera Magic Space en création mondiale © Quentin Lazzarotto
 
Schumann se taille une place de choix lors de la journée d’ouverture, avec les Etudes Symphoniques sous les doigts de Claire Désert (qui offrira par ailleurs la Sonate 1905 de Janáček) et Cédric Tiberghien (photo) dont le très original programme de variations met en perspective les Etudes en forme de variations sur un thème de Beethoven et les Geistervariationen avec les Variations sur un thème de Paisiello et celles sur un thème de Winter de Beethoven.
Quant au dimanche, il revient en totalité aux dames avec un récital à dominante beethovénienne (Les Adieux, Clair de lune) pour Shani Diluka, tandis que Vanessa Wagner joue la carte de la miniature avec un séduisant programme Mendelssohn, Tchaïkovsky, Grieg, où figure aussi la création française de la Berceuse de Francesco Filidei.
 
La musique d’aujourd’hui trouve en effet place dans les programmes de Solistes à Bagatelle et, de ce point de vue, le cru 2021 fera date avec quatre créations mondiales : Magic Space de Régis Campo par Philippe Bianconi, une pièce de Michael Jarrell par Eric Le Sage, Magellan et ses nuages de Christian Rivet sous les mains de Geoffroy Couteau et, enfin, Mémorial-Résurgence de Tristan Murail que François-Frédéric Guy place au cœur d’un programme ouvert par la rare Sonate n°1 d’Enesco – dont l’Andante conclusif offre l’une des plus magiques musiques nocturnes du répertoire de piano – et qui se conclut avec un compositeur chez qui on n'a pas l'habitude de l'entendre : Chopin.
 
Alain Cochard

Les Solistes à Bagatelle
Du 28 août au 12 septembre 2021 (les samedis et dimanches, à 16h et 18h)
Paris – Orangerie de Bagatelle
ars-mobilis.fr/les-solistes-a-bagatelle-editorial-2021/
 
Photo © Jean-Baptiste Millot