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Lyon - Compte-rendu : Siegfried s’endort
Lente, morne, la battue de Gérard Korsten a littéralement plombé le Siegfried si poétique de François Girard, rendant impossible le voyage au pays du merveilleux que le metteur en scène avait si bien réussi lors du Ring proposé par la Canadian Opera Company. D’où vient cette mode de diriger les opéras de Wagner comme si ceux-ci produisaient la musique de leur sépulcre ?
A Paris, Eschenbach se rêvant Karajan nous avait cochonné ainsi tout un Ring, devenu interminable, et pas aidé du tout par le statisme morphique de la mise en espace wilsonienne. Mais il y avait là au moins une unité, et aussi tout de même un orchestre qui phrasait, et déployait quelques couleurs. Korsten enterre toute velléité d’action, et plombe terriblement le I, parvenant à enlever tout suspense à la scène des énigmes alternées entre le Wanderer et Mime. Sa battue s’animait uniquement pour les finales du I et du II, produisant une sorte d’effet de coda assez risible, mais pompierisait le duo final du III.
Le cast promettait peu : Stig Andersen a vraiment la voix de Siegfried, mais sans un repère rythmique il débite morne et droit. Robert Künsli serait un très bon Mime si on lui donnait de la fosse le nerf, le drive qu’il doit en recevoir, Bullock tient avec un certain panache le minimum syndical, Best s’ennuie ferme, et nous impose son style neutre et sa voix délavée. Deux chanteurs essayent de transmuer cette grisaille en or : l’Erda de Mette Ejsing fait mieux qu’un passage, une vraie scène troublante et funeste, et Pavol Hunka, mordant à souhait, en voix charbonneuse, c’est vraiment Alberich, comme au temps des Neidlinger et des Kelemen.
Maigre bilan pour une entreprise courageuse, car donner Siegfried seul est une excellente idée, surtout dans ce spectacle atypique, où le monde du Ring gravite autour de l’œil du cyclone avec son étrange dispositif et ses idées si justes : on gardera longtemps en mémoire le dragon pyramide humaine mue par l’imaginaire funambule d’un metteur en scène qui se voue en ce moment au Cirque du Soleil.
Jean-Charles Hoffelé
Richard Wagner, Siegfried, Opéra de Lyon, le 27 octobre, puis les 7, 10 et 13 novembre 2007
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Photo : DR
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