Copieux programme pour l’Orchestre de Paris et son directeur musical Paavo Järvi avec une plongée dans le tréfonds du romantisme allemand convoquant Schumann, Schubert et Strauss (ces deux derniers pour des lieder, dans des transcriptions diverses, chantés par Matthias Goerne). L’Ouverture Manfred de Schumann (dans l’orchestration de Mahler, il est vrai) paraît boursouflée. Où est l’héroïsme juvénile du héros byronien, sa violence tragique sous les coups de boutoir d’une masse orchestrale surdimensionnée ? On a connu Paavo Järvi plus inspiré s’agissant de la tension dramatique et de la carrure rythmique.

Les lieder de Schubert orchestrés par les plus grands (Brahms, Reger, Webern) perdent malgré tout en substance et en nuances sous le manteau des oripeaux symphoniques, alors que ceux de Richard Strauss de la main du compositeur l’emportent aisément sur les instrumentations du chef d’orchestre Leopold Hager. L’expérience, le sens théâtral, la puissance d’incarnation du baryton Matthias Goerne ne peuvent pas changer le plomb en or. En dépit de l’accompagnement très attentif du chef accordé à la ligne de chant, de la qualité du style et de la perfection d’intonation du soliste, un climat monochrome finit par s’installer. La prestation d’un artiste au summum de ses moyens ne saurait compenser une certaine épaisseur éloignée des versions originales, bien plus subtiles.

Menée tambour battant, la 1ère Symphonie de Schumann suit droit son chemin sans éviter une certaine raideur. Les instrumentistes parisiens, parfois aux limites de l’extrême (Finale), font face avec témérité et cohésion à cette vision éruptive où la précipitation l’emporte assez souvent sur le lyrisme à fleur de peau de la passion printanière

Michel Le Naour

Paris, Salle Pleyel, 11 avril 2012

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Photo : 2008 Marco Borggreve for harmonia mundi