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Metz - Compte-rendu : Le retour du Jongleur
Peu avant l’exécution de l’ouvrage de Massenet (photo) en version de concert à Montpellier (avec Roberto Alagna), l’Opéra-Théâtre de Metz a repris une production stéphanoise du Jongleur de Notre-Dame (« miracle » en trois actes créé à Monte Carlo en 1902) mis en scène par Jean-Louis Pichon dans des décors d’Alexandre Héraud.
Dans le rôle de Jean, Florian Laconi donne du jongleur une composition pleine de fougue au premier acte, et nous fait vivre sa transformation intérieure durant des deux suivants. Mais le rôle est-il dans ses moyens de ténor lyrique ? Il manque à cet admirable artiste toutes les demi-teintes que requiert le personnage, ce qui met en péril plus d’une fois la justesse et le legato requis (air du premier acte), de plus il a tendance à ouvrir dangereusement les sons sur le passage. Péché de jeunesse sans doute.
Frère Boniface est chanté par Alain Fondary. A plus de soixante-dix ans, cet immense artiste prouve ici qu’une carrière bien conduite avec une technique parfaite permet de donner des couplets du premier acte, ainsi que de la légende « de la sauge », une interprétation d’anthologie. Si le souffle devient court, ce qui est normal avec les ans, le timbre a gardé tout son velouté, et la musicalité de ce Grand Monsieur n’est jamais prise en défaut.
Le Prieur de Philippe Kahn, avec des graves somptueux, sait se faire menaçant lors de sa première rencontre avec Jean, et plein de compassion quand celui-ci devient un de ses frères.
Les quatre moines sont excellents, mais dominés par la prestation de David Lefort (Moine Poète) ténor demi-caractère qui dans ses courtes interventions nous donne de suaves demi-teintes avec un timbre jamais forcé, de même qu’un appui sur le souffle d’une rare élégance. Voilà la véritable voix pour Jean !
Chœur admirable d’une grande finesse et d’une homogénéité parfaite, préparé par Jean-Pierre Aniorte. Mais on se demande ce que vient faire dans cet ouvrage intimiste le renfort de l’Ensemble Mille e tre, d’une justesse parfois douteuse.
Jacques Mercier à la tête de l’Orchestre National de Lorraine, donne de l’ouvrage de Massenet une interprétation contrastée. Les cordes chantent et les cuivres, d’une grande justesse, ne couvrent jamais l’ensemble. Le chef a l’intelligence de débarrasser la partition de tous les rubatos intempestifs dont la tradition a encombré la musique de Massenet. Sublime violon solo de Philippe Villafranca à la sonorité fruitée. L’entracte du troisième acte est un peu gâché par la sonorité aigrelette du hautbois de Pascal Heyriès.
Bernard Niedda
Metz, Opéra-Théâtre, le 28 janvier 2007
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