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Orphée et Eurydice de Gluck/Berlioz au théâtre de Caen - Un monde des enfers féerique – Compte-rendu

Un choc ! Une émotion de tous les instants ! Un spectacle dont on ressort à la fois bouleversé et émerveillé ! Aucune exclamation, même la plus laudative, ne saurait vraiment traduire le ravissement, au sens propre du mot, que fait naître l’Orphée et Eurydice de Gluck, dans la version remaniée de main de maître (pour Pauline Viardot) par Berlioz en 1859 et présentée au théâtre de Caen par Václav Luks et Aurélien Bory.
C’est Raphael Pichon, à la tête de son ensemble Pygmalion, qui en 2018 avait mené à bien ce projet avec le metteur en scène Aurélien Bory pour l’Opéra-Comique, les trois rôles étant tenus par Marianne Crebassa, Hélène Guilmette et Lea Desandre.
 

© Pierre Grosbois

Six ans après, pour la reprise de cette production, le bouillonnant chef tchèque et son diabolique Collegium 1704 sont dans la fosse et mettent en valeur la délicatesse et la puissance de la partition de Gluck. Marie-Claude Chappuis incarne avec une déchirante humanité Orphée, Mirella Hagen est une touchante Eurydice et Julie Gebhart, un délicieux Amour. Il y a aussi un quatrième protagoniste dont il faut louer les qualités vocales et la parfaite diction : les 24 chanteurs du chœur du Collegium 1704, terrible représentation du peuple des enfers, auxquels se joignent six danseuses parfaitement intégrées à l’ensemble.

Comme en 2018, la mise en scène et les décors d’Aurélien Bory sont magnifiés par l’utilisation subtile du Pepper’s ghost, un immense cadre de 11 mètres sur 7 qui a les mêmes propriétés optiques qu’un miroir et qui permet des jeux de reflet et de perspective rarement vus sur la scène d’un opéra (notamment un saisissant point de vue pour le spectateur qui semble voir le drame depuis les cintres). Des effets de vagues suggérés par un immense drap noir, l’utilisation d’une trappe au centre du plateau ajoutent à cette féerie visuelle d’une grande poésie.
Reprenant les propres mots de Berlioz en hommage à Léon Carvalho, le directeur du Théâtre-Lyrique, qui lui avait demandé de remettre en scène l’Orphée de Gluck, il s’impose donc d’écrire que nous avons vu « par ce coup d’audace un des plus grands succès dont nous ayons été témoins ».

Thierry Geffrotin

 

 Gluck/Berlioz : Orphée et Eurydice – Caen, Théâtre  21 janvier 2024 ; reprise à Luxembourg (Grand Théâtre) les 6 & 8 février et à Versailles (Opéra Royal) les 7, 9 et 10 mars 2024
theatre.caen.fr/spectacle/orphee-et-eurydice-0
theatres.lu/fr/orphee
www.chateauversailles-spectacles.fr/programmation/gluck-berlioz-orphee-et-eurydice_e2774

Photo © Théâtre de Caen
 

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