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Paris - Compte-rendu : Corrosive ironie


La musique occupe une place de choix dans la programmation de l’Athénée. L’hommage rendu dans le théâtre de Louis Jouvet au compositeur argentin Mauricio Kagel, récemment décédé, par l’Ensemble 2e2m et son directeur musical Pierre Roullier offrait une bonne introduction à l’art d’un musicien iconoclaste qui, pourtant, a su pénétrer comme jadis Kurt Weil le tréfonds de l’âme humaine. Pierre angulaire de la soirée, le spectacle musical Le Tribun (1978) illustre le discours cacophonique d’un dictateur (il peut être de tous les pays et de toutes les époques) magnifiquement interprété par le comédien Bernard Bloch plus vrai que nature mais capable de distanciation dans la mise en scène épurée et imaginative de Jean Lacornerie (l’image surdimensionnée et éclairée de l’acteur à la tribune est projetée sur écran par le truchement d’une caméra). Les interventions très suggestives de l’Ensemble 2e2m, interrompues autoritairement par le tribun, commentent ses vociférations et pervertissent de manière sarcastique le texte écrit par Kagel.

Après l’entracte (mais le diptyque aurait pu être joué en continu), la pièce instrumentale Finale (1981) est une parodie du rôle de chef d’orchestre et une satire de tous les pouvoirs quels qu’ils soient. L’œuvre débute de manière anodine puis s’arrête de façon théâtrale lorsque le chef aux gestes désarticulés s’écroule, terrassé par une crise cardiaque. Les musiciens d’abord interloqués reprennent vite les choses en main (le violon solo d’abord puis le piano et l’ensemble tout entier), désormais indifférents aux contingences terrestres.

Cette suprématie de l’Art est bien le message final de Kagel dont il faut féliciter l’Ensemble 2e2m d’avoir su si bien transmettre l’esprit.


Michel Le Naour

Mauricio Kagel, Le Tribun / Finale – Athénée Théâtre Louis-Jouvet, le 1er novembre 2008

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Photo : DR

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