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Paris - Compte-rendu : Du nouveau dans Cosi
Chéreau est revenu sur son Cosi fan tutte, y infusant plus de légèreté, tirant vers la comédie, le tout toujours aussi subtilement chorégraphié. On ne voit plus à l’opéra sinon chez Olivier Py un tel art de la direction d’acteur, et une telle disponibilité lorsque une chanteuse douée de talents de comédienne pointe le bout de son nez.
Mary McLaughlin a inspiré à Chéreau la composition d’un personnage haut en couleurs. Certes une Despina selon la tradition, mais croquée avec une finesse persifleuse . Et avoir une vraie Despina en place de l’absence chronique qu’y proposait Barbara Bonney, cela vous change ce Cosi au printemps encore si automnal. Revigoré par ce petit bonheur, Ruggero Raimondi éclate de santé, et marque encore plus son Alfonso roué. Formidable prestation d’acteur. Les esprits chagrins auront remarqué que ni l’une ni l’autre ne sont dans leurs meilleures voix. La belle affaire. A la fin il faut bien convenir que même les jeunesses de la distribution ne sont guère plus en veine : Ferrando toujours aussi falot de Shawn Mathey, sans legato, sans vocalise, au timbre petite petit, Hannah Ester Minutillo annoncée malade et qui chantait pourtant toujours aussi faux que d’habitude, même Stéphane Degout, au timbre monochrome, en voix de bois, vraiment pas dans ses meilleures cordes vocales.
Mais tous jouaient avec une vivacité et un naturel saisissant et derrière chacun de leur geste on percevait l’impulsion de Chéreau. Révélation : Erin Wall a enfin la stature vocale de Fiordiligi alors que l’année dernière encore elle n’aurait fait qu’une honnête Despina : le médium s’est étoffé, la vocalise enfin assurée brille et emplit le théâtre, la couleur naturellement nacrée de son joli soprano s’est ambrée. Et l’artiste aussi s’est affirmée, tenant des promesses que beaucoup n’avaient pas même notées. Bravo.
En fosse, routine tranquille de Gustav Kuhn, qui dirige doux et léger. Mais ce Cosi était autant celui de Chéreau que celui d’Harding et en l’absence du chef anglais, toujours brouillé avec les musiciens troublions de l’Orchestre de l’Opéra, les spectateurs parisiens contrairement aux chanceux festivaliers aixois, n’ont, en quelque sorte que la moitié de ce spectacle dont la nervosité s’appuyait justement sur l’énergie d’une relecture musicale acérée.
Jean-Charles Hoffelé
Cosi fan de tutte de Mozart, Palais Garnier, le 30 octobre, puis les 3, 6 et 8 novembre.
Le programme détaillé de l’Opéra Garnier
Photo : Eric Mahoudeau/Opéra de Paris
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